Transhumance dans les Andes

Le convoyage à proprement parler commence aujourd'hui. Nous voilà devenus "reseros", ces hommes qui conduisent les troupeaux. La matinée est mise à profit pour permettre au bétail de se nourrir et de s'abreuver avant d'attaquer la longue piste qui nous mènera jusqu'au premier bivouac. L'occasion de profiter d'un instant de tranquillité et de se faire plaisir avec quelques galops dans la vallée. Il nous suffit juste de surveiller les bêtes afin qu'elles ne partent pas soit dans la vallée, soit remontent dans la montagne.

Sous les sifflements des hommes, les aboiements des chiens et les meuglements des vaches le groupe se met en route. Une attention de tous les instants s'avère nécessaire le temps de conduire le troupeau jusqu'à la piste, puis encadrés par la rivière d'un côté et la montagne de l'autre il nous suffira de surveiller les bêtes : pousser les animaux les plus lents, escalader une pente pour faire redescendre une vache intrépide ou installer un veau de quelques jours en travers d'une selle pour le ménager. C'est l'occasion de discuter, de profiter du paysage pendant quelques heures avant d'être à nouveau plus actifs à l'approche de la vallée et du corral où les animaux seront parqués pour la nuit. Une course poursuite s'engagera avec un veau récalcitrant à travers le campement, sous les cris et les rires quand il se prendra les pieds dans les tendeurs de l'une des tentes. Nos chevaux sont laissés en liberté pour qu'ils se nourrissent et s'abreuvent ; seuls deux des animaux seront "maneados", des menottes de cuir attachées à leurs antérieurs leur permettent de se déplacer pour manger mais pas de s'enfuir. On les utilisera si nécessaire le lendemain pour aller récupérer les chevaux qui se seraient un peu trop éloignés.

Mario a installé le campement ; le confort est succinct mais un tuyau a été prévu afin de canaliser l'eau d'une source et il y a même des arbres (ce qui n'est pas une mince affaire dans cette région : tous les arbres que l'on peut voir ont été plantés par l'homme, la région est désertique, ils ne poussent pas naturellement). Il nous suggère d'installer nos affaires avant la tombée de la nuit et, pour ceux qui choisissent de dormir à la belle étoile, nous indique les meilleurs endroits. "Votre tête dans cette direction. A quatre heure du matin vous verrez se lever Alpha du Centaure grande comme ça" (en nous signalant la taille d'un ballon de foot…). Après le dîner Mario s'improvise DJ en allumant le lecteur CD du minibus et nous voilà partis à danser à côté du feu. Puis pour notre plus grand bonheur, il sortira sa guitare pour nous régaler des mélodies de la région. Le crépitement du bivouac et la douceur de ces instants magiques où l'espace de quelques heures le monde disparaît pour ne faire place qu'à la chaleur de l'amitié.

Mario

Mario

Le lendemain nous serons debout de bonne heure, la nuit a été fraîche, le parfum des flammes nous invite à aller nous réchauffer. Nous prenons notre temps profitant du lever du soleil et les garçons entament même une partie de fer à cheval. Ayant récupéré et sellé nos chevaux, nous faisons traverser la petite rivière au bétail et reprenons la route à travers les montagnes. Ca monte, ça descend, ça remonte, ça redescend, ça zigzague. Il nous faut suivre le chemin à travers les monts et les vallées pour arriver aux lagunes. Un troupeau à proximité nous obligera à faire un déjeuner rapide sous peine de voir les animaux se mélanger. Mario a le temps de débusquer un ñandu, cette autruche sud-américaine qui court encore dans les collines. Alexis et Leo ont fort à faire avec les juments qui ne cessent de s'éloigner ; nous restons seuls avec les vaches, obligés de surveiller chaque buisson : les veaux les plus jeunes sont fatigués et ne cessent de se coucher. Puis la civilisation nous rattrape : il nous faut traverser une route, la seule depuis le début, afin d'atteindre la plaine. C'est dans un nuage de poussière impressionnant soulevé par les juments au galop que nous finirons cette journée. Il est plus de 18h00, nous sommes à cheval depuis 10h00 et pourtant nos chevaux trouvent encore la force d'accomplir un dernier galop un peu fou pour retourner vers la route, déposer le matériel et reprendre le minibus.

Notre aventure avec la famille de Nivaldo s'arrête là, demain nous irons découvrir le travail des gauchos dans une estancia. Nous faisons nos adieux à nos chevaux, à Alexis et Leo en ayant conscience que nous avons pu toucher du doigt un mode de vie inchangé depuis la colonisation de ce continent, qui malgré le progrès et la technique semble devoir perdurer à tout jamais. Un pays où l'histoire reste vivante et où le mythe du gaucho de la pampa solitaire restera pour toujours une réalité.

Le Groupe

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