Etna

Samedi 13 mai

8 heures, on est prêts à partir vers Reggio di Calabre et Vila San Giovanni pour l'embarquement vers la Sicile sans doute dans la journée. Les jolis villages rencontrés sont autant de soucis pour les traverser et le problème de l'arrêt subsiste plus que jamais. On doit faire l'impasse sur les balades au fil des rues, qui permettent des découvertes et même l'achat de produits alimentaires est impossible, pourtant ils commencent à nous manquer cruellement. Seul, le pain ne nous fait pas défaut, car on l'achète chez le pompiste en même temps que le gazole. On l'emmaillote soigneusement comme un bébé pour le garder mangeable. Le mot d'ordre est : rouler .

C'est au Monte Alla que nous trouvons refuge le temps du repas de midi. C'est un superbe belvédère, au sommet duquel se trouve un séminaire. On aperçoit d'ici la mer qui baigne le pied de la montagne et un escalier creusé dans le roc permet d'accéder à une plate forme d'où le point de vue est exceptionnel.

On quitte Monte Ella pour rejoindre Vila San Giovanni afin d'embarquer pour Messine. Suivre les panneaux qui nous mènent au port n'est pas la meilleure solution, car ils nous mènent tout droit à une entrée trop basse pour qu'on puisse passer dessous. Deux vieux Italiens en train de rêvasser sur un banc, nous dirigent vers le bon chemin et même nous suivent pour nous remettre éventuellement dans la bonne direction. Un grand merci à tous ces gens qui nous ont aidés et sans qui notre voyage aurait tourné court.

Il y a une longue file d'attente à la station maritime, un guichet est dressé au milieu et je vais prendre notre billet d'embarquement. En revenant, je m'aperçois que le camping car a disparu. Je remonte la file impressionnante de camions sans succès, puis accompagnée d'un employé qui, de bonne grâce m'aide dans mes recherches, nous retrouvons enfin le camping car et le mari tous deux disparus parmi la grosse foule des bahuts. Dès lors on va occuper la place qui nous est assignée dans la cale, d'où coincés il nous sera impossible de sortir sur le pont.

Le trajet dure 30 minutes environ, puis on joint Messine et prenons la route pour Taormine où commencera notre nouveau voyage en Sicile, que nous avons visitée en 1983 et n'avons jamais oubliée. Pourtant, il ne faut pas aller à la recherche de souvenirs, mais plutôt à la découverte du pays tel qu'il est devenu, c'est valable pour toutes les régions du monde...C'est sûrement à cause de sa beauté que Taormine est tant visitée en toutes saisons. Nous n'avons pas réussi à y glisser nos deux pieds ni même un seul..Aucune possibilité ici de trouver la moindre place de parking et les campings sont lointains comme tout. Nous décidons de tourner le dos à toutes ces difficultés et de réfléchir au meilleur moyen de les résoudre. On sort de la ville fourbus, déçus de renoncer si près du but, les nerfs en pelote.

Il faut s'arrêter pour dormi n'importe où, ce que l'on fait sur une aire parmi les camions, où l'on s'endort à poings fermés malgré le bruit des frigorifiques.

Dimanche 14 mai

Aire d'autoroute entre Taormina et Catane
Il est 7 heures 20 et le soleil est déjà là menaçant d'être très chaud. Que nous réserve cette journée ?

On décrète, l'impasse provisoire sur Taormine, à voir à notre retour.peut être. La soif d'un peu de solitude se fait déjà jour dès le début de notre entrée en Sicile, pour ne plus nous quitter. Et l'on prend la direction de l'Etna. La route contourne par le sud le volcan le plus grand d'Europe et le plus actif. Le circuit emprunté est magnifique, d'où les échappées vers la montagne magique sont à couper le souffle. Malgré le temps très ensoleillé, la neige coiffe encore les sommets. Quelques villages sont traversés dont Nicolosi où la lave de l'éruption avait cessé sa course en 1983. IL en reste des murets et des maisons construits avec la lave du séisme, qui donne un paysage noir et un peu triste, mais heureusement égayé par des profusions de genêts en fleurs. Après une montée laborieuse entrecoupée d'arrêts photos nous arrivons au refuge de Sapienza reconstruits et méconnaissable. Un grand parking est prévu pour les campers en grand nombre, on va pouvoir reprendre notre souffle.

Et l'on va vers le petit cratère, noir de monde. IL donne l'illusion d'un grande expédition alors qu'il est situé au bout du parking, a vec juste une petite montée que les visiteurs font en parlant d'autre chose. Nous sacrifions au rite et faisons le tour de cette bouche de volcan où une tente d'observation a été montée tout en bas. La lave est foncée avec des tendances rouges, signe de sa teneur en fer. Les bus de touristes se sont groupés devant le restaurant et les bazars à babioles ont affichent des prix plus élevés que partout ailleurs, mais font des affaires en or. Sculptures de lave, bijoux d'obsidienne, pierres brillantes ou colorées artificiellement, on trouve ici toutes sortes d'objets. Le vendeur me fait cadeau d'une carte postale invendue, mais ses prix sont mal ajustés et, comme tout le monde je me fais avoir, mais modérément.

On prend le téléphérique pour monter au refuge del Bosco, puis un bus 4/4 prend le relais jusqu'au sommet de l'Etna. Un guide nous accompagne aux endroits pittoresques et protégés.

Nous sommes seuls dans la cabine suspendue du téléphérique, des bruits suspects nous inquiètent au départ puis, il y en a tant que l'on s'habitue. Au refuge, le bus tout terrain nous attend, il est vite envahi par la petite expédition d'une dizaine de personnes, dont nous faisons partie. Seuls Français du groupe, la difficulté de compréhension nous isole bien un peu, mais on va faire avec. La montée entre des murs de neige nous fait penser un instant à la Norvège, c'est surprenant ! A l'arrivée, un guide nous prend en charge et détecte vite notre non appartenance à la colonie Italienne. Il parle un peu le Français justement, ce qui nous arrange bien et sans doute à cause du risque lié à notre âge, ne nous quittera guère. La montée est très dure, mais c'est le tribut à payer pour voit le volcan au fond des yeux. La lave est devenue poussière, d'énormes crevasses crachent des fumerolles qui s'échappent des pentes neigeuses, c'est drôlement impressionnant.

A la Torre del Filosofo, le guide fait un petit exposé scientifique, hélas ! tout de suite oublié. Le vent des hauteurs commence à sévir durement, heureusement le coupe vent sur la polaire protège presque radicalement. Mais je récolte l'onglée que le guide soigne en me donnant une poignée de lave brûlante. Le vent cingle le visage, rabat mes cheveux sur les yeux menaçant mes lunettes qui risquent d'être arrachées. Je serais à bout si je ne regardais pas autour de moi, en mesurant la chance de voir ce paysage magnifiquement impitoyable mais d'une incroyable beauté. Le feu est partout, la terre fume ses feux intérieurs, malgré la neige qui recouvre sommets et pentes. C'est la forge de Vulcain disait-on au moyen âge, ou l'entrée des enfers, malgré cela on grelotte. Un jeune grimpeur chaussé de tongs patauge pieds nus dans la neige, sans se plaindre . D'autres sont là en tee shirts, shorts ou petite chemise. J'ai froid partout rien qu'a les regarder. Jean filme peu, très peu, trop peu à cause de ses démêlés avec son genou qui lui laisse peu de répit. Mais il ne se plaint pas et avance bravement jusqu'au bout, refusant d'admettre qu'il vaudrait mieux renoncer à une partie de l'itinéraire, la plus difficile donc la plus belle. La récompense est au bout de l'effort et j'espère que les photos prises avec mes doigts insensibilisés par le froid restitueront la beauté de ce site à nul autre pareil.

Le retour est euphorique, dans le panier wagon où nous sommes seuls avec les bruits inquiétants de la mécanique, face au grandiose paysage des pentes où la verdure s'est réinstallée au fil de la descente.

Nous rentrons chez nous, mais beaucoup de nos voisins ont levé l'ancre, heureusement il en reste encore huit qui vont passer la nuit ici, comme nous. La fatigue nous envahit , mais grâce au portable on visionne les photos qui prolongent la joie de la découverte.

Souper, repos afin de récupérer nos forces et de recommencer d'autres randonnées.