Cercle Polaire

Voilà ! C’est le kilomètre zéro de la région du Nordland, nous passons sous l’arc de triomphe qui représente une aurore boréale. Nous allons rouler vers le cercle polaire.

arc de triomphe   

Le paysage se fait de plus en plus étrange. Un changement s’opère dans la végétation  qui se raréfie et les forêts disparaissent pour laisser place à des collines pelées, battues par les vents. C’est désormais le domaine de la toundra.

En fin de journée, on atteint le cercle polaire. Nous sommes seuls encore une fois, dans un froid glacial où
pourtant la neige s’évertue à fondre. Nous avions projeté de dormir ici, comme nous l’avions fait en 1995, mais ce n’est pas réalisable aujourd’hui. Avant de partir, nous allons saluer le Polarcirkel, ce bloc de pierre surmonté de deux anneaux de fer, dont l’un symbolise le globe terrestre et l’autre le cercle polaire arctique, cette ligne imaginée par les hommes, pour délimiter le soleil de minuit et la nuit polaire en hiver.

Devant le magasin musée fermé, montent la garde une dizaine de drapeaux  triangulaires de la Norvège, qui flottent au vent glacé de la planète «  terre « .

En revenant sur nos pas, on retrouve un climat plus tempéré et un endroit presque idéal pour dormir, dans un petit village de trois maisons, abrité d’une haie de bouleaux. Des routiers s’installent aussi, c’est tranquillisant de ne pas être seuls. On ne peut pas imaginer pays plus calme !….

village

 

Jeudi 27 mai

Retour aujourd’hui au cercle polaire, où sont arrivés quelques autres visiteurs, camping caristes pour la plupart. Il faut bien marquer le coup par quelques petits cadeaux, cartes postales, tee shirts etc.…Il est impossible, d’aller dans le pré aux cairns pour marquer notre passage avec des cailloux, la neige y est si épaisse, qu’on ne peut s’y risquer.

On reprend la route de Fauske où l’on s’approvisionne en carburant. Nous rencontrons deux Français du Var terminant leur voyage. Quelques tuyaux expérimentés ont été les bienvenus, en particulier celui du diesel à prix compétitif….Il s’agit d’utiliser les pompes agijtsfri, c’est bien ça, à condition de pouvoir prononcer un pareil galimatias. Ce qui signifie, qu’en tant que touriste, il est possible de passer outre les taxes prohibitives du carburant, ces taxes finançant les services sociaux et autres…auxquelles on n’est pas soumis, n’ayant aucun droit. Cette astuce, à condition de la connaître s’est avérée profitable et nous a permis de payer notre litre de diesel le même prix que chez nous et non deux fois plus cher.

Contrairement à mon habitude je n’ai pas pris leur adresse pour les remercier, je regrette encore cette négligence.

Ils rentrent des îles Lofoten et ont passé leur séjour à pêcher la morue, qu’ils ont entassée dans des caisses, et ainsi parfumé leur habitacle. Jeannot refuse catégoriquement leur offre, lorsqu’ils nous proposent un filet à frire dans notre poêle. Cette rencontre pittoresque et rare nous fait du bien , mais hélas nos chemins se séparent, ils repartent vers le sud d’où nous venons….

Nous faisons nos courses dans un supermarché à Fauske. C’est la première fois que nous achetons du pain ailleurs que chez le pompiste. J’ai acheté du «  surkal «, produit que j’ai pris pour des nouilles, d’après la photo de la boite. Las ! ce n’est que du chou coupé menu et bien sucré, c’est absolument infâme, j’ai tout jeté à la poubelle. Sur le présentoir des journaux locaux, trône Zidane , grand format sur la première page. Il a l’air d’avoir fait une action d’éclat, comme à son habitude, mais on n’en saura pas plus et je n’ose rien demander, de peur de ne pas comprendre la réponse. Ici la frustration des bavards est à son comble.

Voici donc, vers Bodö le fameux pont sur le Salstraumen . Ce pont enjambe le fjord où se produit le phénomène du maelström 4 fois par jour entre marée haute et marée basse. Ce phénomène est provoqué par le flux de la mer qui déverse des millions de mètres cubes d’eau  dans un goulet étroit, provoquant ainsi d’énormes tourbillons.

pont
       

Pendant vingt minutes, les poissons apeurés désertent les lieux et du coup les pêcheurs aussi. La valse des eaux va s’amplifiant les vingt minutes durant. Des milliers de mouettes colonisent les rives  et les couvrent de fiente, pendant que d’autres se risquent à braver les tourbillons impressionnants.

Postés au milieu du pont, malgré nos polaires, kway  et vêtements chauds empilés sur notre dos, nous sommes glacés jusqu’aux os , mais pour rien au monde nous n’aurions manqué le Salstraumen .

Il est en ce moment 18 heures 07, la prochaine marée a lieu à minuit 07 mais, compte tenu du froid de Sibérie  nous ne serons pas là, nous allons tenter de nous réchauffer et de sécher nos effets.

Nous campons pour la nuit sur le parking du sport et de l’école. Les gosses au matin frappent aux portes et partent en riant. Il y a trois autres camping cars, que l’on croyait Allemands, mais ce sont des Français, qui ne nous saluent même pas et l’on fait pareil…
 

Vendredi 28 mai

Avant de quitter le Salstraumen, nous visitons le musée, à l’autre bout du pont. On y trouve des curiosités géologiques, maritimes et  une étude ornithologique, le tout passionnant.

La route de Narvik que nous prenons est en travaux «  omrades « , il y a donc des déviations plus ou moins bien signalées. Puis ce sont les tunnels qui se succèdent, et je ne sais pas s’ils sont si réglementaires que ça… Creusés sommairement dans la roche sur plusieurs kilomètres,  éclairés des seuls phares de la voiture souvent à une seule voie, ou bien s’il y en a plusieurs, sans matérialisation de route. On les passe avec crainte, en scrutant le jour qui annonce la fin.

ferry
         

La traversée par ferry Bognes skarberget nous fait joindre la E 6. On paie 99 NOK ce qui revient à 12 euros, à peu de choses près. Ces mini croisières, obligatoires et répétées finissent par  faire des sommes importantes en fin de journée, mais les paysages qu’elles nous révèlent sont si beaux !

Nous voulions faire une halte à Narvik, ville historique, mais il nous est impossible de nous arrêter et le seul parking éloigné de la ville, tagué jusque sur les voitures ne nous a pas inspiré confiance. Nous avons donc pu voir la disparition du monument dédié aux héros de la guerre sorte d’obélisque pointue et brillante. Une promenade fleurie la remplace. Devant le musée deux vagues tanks peints en jaune, n’incitent pas à la visite. Seul reste l’arbre aux directions, où sont inscrites toutes les capitales Européennes et où l’on se prend à rêver un peu, sans souci des énormes distances.

Nous sommes le week end de Pentecôte, notre hôtel pour cette nuit sera l’aire devant le fjord . J’avais signalé cet endroit sur mon ancien  carnet de route , nous l’adoptons à nouveau. Déjà en stationnement, des caravanes de Norvège, tous drapeaux hissés, sont là pour tout le week end. Ce patriotisme exacerbé nous étonne et je ne peux m’empêcher de les envier d’être à ce point fiers de leur pays, jusqu’à friser l’orgueil et un peu la naïveté . Il n’y a pas de maison de vacances qui n’ait devant sa porte le drapeau dont ils hissent les couleurs à leur arrivée, histoire de dire, « Salut, nous sommes là ! «  à la cantonade.

fjord    

On devrait admirer le fjord toute la nuit, car il s’étale juste à côté de nous et nous offre un festival de reflets et de beauté. Les montagnes enneigées y jettent leur image, que l’on peut voir en double, comme une tâche d’encre  sur une page pliée, que l’on ouvre. Mais on dort à poings fermés, dans le calme ambiant et malgré le jour qui s’obstine.