RAID 4x4 en Tunisie : Puits artésiens, El Borma, Ksar Ghilane, Douz, Chott El Djerid, Kairouan, Tunis

jeudi 17 avril 2003

Nous ne sommes pas encore sortis de l'Erg. Encore quelques dizaines de kilomètres en direction du Nord pour rejoindre la base militaire de Chouech (poste de contrôle) où nous devons déclarer une fois de plus notre passage, qui prouve que nous sortons de la région désertique. Mais quel plaisir, encore des dunes à franchir et pas des moindres. Au milieu de ce paysage couleur ocre, nous trouvons un endroit à l'abri où le sable est assez porteur pour nous arrêter pour un confortable casse-croûte avec Guy, Marc, Cédric, Jacky et D. Pour nous le menu n'est pas fantastique en raison d'un manque d'organisation du côté de notre propre logistique, mais nous sommes gâtés par Jacky et D. qui nous font profiter à chaque fois de leur confort. C'est pratique d'avoir à son bord un grand frigo. Le petit rosé bien frais, et les oeufs sur le plat en plein désert, il faut le vivre, ça !

Traces dans les dunesLe Land Rover de Marc et le Pajero évoluant dans les dunettes

Arrivés à El Borma, nous poursuivons en longeant le pipeline sur la piste parallèle. Mais peu à peu, le sable la recouvre en formant des dunettes de plus en plus marquées, et leur franchissement est parfois complexe. Il faut trouver la bonne passe dans le sable mou, ce qui nous vaut encore quelques ensablements.

Une fois passés de l'autre côté du pipe, nous retrouvons une grande et large piste qui permet quelques excès de vitesse (ici pas de radar !), mais attention aux petites bosses qui nous font vite décoller du sol. Nous devons être extrêmement vigilants. La tête qui bute au plafond, c'est du quotidien ! Guy nous fait même quelques belles figures en décollant les quatre roues mais le Pajero reste bien en ligne. Après ces quelques petites frayeurs éphémères, nous trouvons un endroit idyllique pour nous arrêter déjeuner, au pied d'une montagne de cailloux faisant penser au décor du Grand Canyon de l'Arizona. Seuls les deux gros tuyaux de pétrole lourd, jamais très loin de nous (ils sont notre guide) gâchent quelque peu le paysage.

Le long du pipeline d'El Bormapiste qui longe le pipeline El Borma

Reprenons la piste ! 20 kilomètres de grandes lignes droites où le Land Rover, le Toyota, et le Pajero peuvent s'exprimer à pleine puissance, roulant parfois de front sur des lignes parallèles, nous conduisent sur une petite route, que nous avons tôt fait de quitter pour nous retrouver sur des pistes plus étroites. L'orage arrive, le ciel devient gris orangé, et un gros nuage nous arrive dessus. Incroyable, c'est la pluie. Nous traversons des paysages sublimes et la couleur du sable vire au brun foncé. Dieu que c'est beau !

Dix minutes après, fini ! Le ciel se dégage de nouveau comme s'il ne s'était rien passé, nous laissant la voie libre et un sable plus porteur jusqu'à l'oasis de Ksar Ghilane qui semble être difficile à atteindre. Les dernières portions de l'étape sont pénibles car très bosselées. Notre vitesse est faible et la journée finit par être interminable.

Ksar Ghilane nous accueille, avec ses touristes venant de toute part. Le retour à la civilisation en quelques sorte. Quel choc, après 4 jours seuls dans le désert ! Rien de très excitant. Malgré la proposition de dormir sous des tentes berbères aménagées, nous préférons tout de même notre petite toile de tente, cloîtrés au fond du camp à côté de nos véhicules respectifs. Question de dignité !

Oasis de Ksar Ghilane

vendredi 18 avril 2003

Petit déjeuner européen (là encore, rien d'extraordinaire), road-book en main, nous reprenons la piste en direction de Douz. Un très beau parcours dans les dunettes de sable jaune, avec des enchaînements loin d'être faciles et le stress qui monte un peu à chaque passage. C'est quand même excitant, il ne faut pas relâcher sont attention une seule seconde sous peine de poser le châssis. Ici, le remorquage est impossible. Je reste vigilant.

Sortis de ces dunettes, nous retrouvons de la piste sablonneuse, en essayant de respecter à la fois les indications du road-book, et les points de passage GPS donnés par Christian. En nous efforçant de suivre ces contraintes, nous faisons plus de chemin que d'autres qui coupent souvent le trajet prévu, mais c'est un choix que nous faisons. Un peu plus loin, nous arrivons face à un immense cordon de dunes que nous devons traverser selon le road-book. D'ici, ça parait impossible, d'autant plus qu'elles sont formées de telle sorte que nous allons les aborder à rebrousse-poil, c'est-à-dire en attaquant le côté le plus abrupt. Rendons-nous à l'évidence, nous devons passer. L'itinéraire ne nous laisse guère d'autre choix, à moins d'aller chercher une passe loin d'ici.

A ce moment-là, au pied de cet énorme difficulté apparente, nous apercevons le Steyr Puch Pinzgauer, un 6 roues motrices compact dont la présence est rassurante. Ce véhicule semble passer partout et nous demandons aussitôt à son propriétaire, Roland, s'il nous est possible de le suivre dans les dunes. Pas de problème, avec Jacky nous encapons derrière lui à une ou deux dunes de distance, et tout se passe bien ou presque, faisant fi des difficultés envisagées au départ.

Le Pajero et le Pinzgauer 6x6 de RolandDépannage dans le sable mou

Sortis de ce large cordon mais passés avec grande satisfaction, nous nous laissons glisser jusqu'au Café du Désert, lieu de passage incontournable par les gens qui sillonnent la région. Il est temps de remettre de la pression dans les pneus pour continuer car nous arrivons sur la piste avec ses cailloux.

Café du Désert - Douz

La piste nous conduit à Douz, où nous dégustons au frais un divin couscous dans un restaurant, le "Rendez-vous".

rose des sables à Douz

Il faut reprendre la route, la journée est annoncée longue jusqu'à Nefta, située au nord-ouest du Chott El Djerid.

Nous traversons tout d'abord une petite partie du Chott el Djerid sur un kilomètre, comme pour nous faire la main sur cette surface constituée d'une croûte mélangée de sable et de sel. Déjà, j'ai le sentiment de perdre un peu le contrôle de la trajectoire. Je sais que nous allons le traverser plus loin et je m'attends au pire.

Le Chott est en fait un genre de lac desséché, une mer de sable gorgé d'eau salée avec une croûte plus ou moins porteuse selon les conditions météo des jours précédents et de la température. Par endroit, ça relève du sable mouvant. A d'autres, la croûte en surface est dure et on peut y marcher ou y rouler. Nous verrons bien.

Empruntant une route goudronnée vers l'ouest au sud du Chott El Djerid par des petites pistes très sablonneuses en alternance avec des dunettes de sable mou, nous approchons de cette fameuse traversée. Au point GPS de coordonnées N 33° 19' 4.6 " et E 8° 1' 36.5", nous quittons la route juste en face d'un poste de garde nationale pour remonter au nord dans le Chott, tout d'abord par des pistes cassantes ou nous nous faisons secouer comme des pruniers. 25 minutes plus tard, au point N 33° 40' 35.3" et E 7° 50' 42.5", la ligne droite infernale commence : une trace au centre, glissante, profonde et parfois remplie d'eau. Une seule possibilité, garder les roues dans cette trace, et avoir de la vitesse pour ne pas s'enfoncer au passage. Une règle primordiale : ne surtout pas en sortir.

La nuit commence à tomber et la visibilité est par conséquent réduite. Mais je ne réfléchis pas une seconde de plus, j'y vais, j'accélère. Une première traversée où je réussis à rester dans cette trace dans des grandes gerbes d'eau où je ne vois rien pendant 30 mètres (je n'avais pas mis les essuie-glace). Guy s'occupe de ça, mais nous ne voyons toujours pas grand chose car les phares sont crépis de cette horrible boue sableuse qui semble sécher instantanément.

C'est très stressant car on sent la voiture qui est terriblement freinée, et je crois que c'est grâce à la vitesse et donc à l'élan que nous sommes passé de l'autre côté, nous laissant un peu de répit pour nous remettre de ces émotions sur un sol un peu plus porteur.

10 minutes plus loin, même scénario, mais plus long cette fois. On recommence, à fond de 3ème dans la trace , tous phares allumés, essuie-glace et lave-phare en route, et on verra bien... Je n'ai pas fait 500 mètres alors que je vais droit sur quelques véhicules plantés au beau milieu de ce merdier. Je dois freiner un peu et rétrograder en 2ème, perdant de la vitesse et devant m'écarter de la trace principale sous les signes d'un type sur place. Après deux secondes, la voiture s'enfonce irrémédiablement sous la croûte de sable salé, freiné par la densité de ce mélange boueux. J'essaie de mettre les gaz, en commençant à partir en travers, mais rien n'y fait, je suis arrêté, comme les 4 autres véhicules, les roues plantées.

L'entraide s'organise entre les 4x4 échoués ici pour essayer de les sortir un à un, tandis que la nuit est bien tombée. C'est angoissant. Il n'y a rien d'autre à faire que de creuser avec les pelles pour dégager les roues et, à l'aide des plaques de désensablement et au treuillage, essayer de remonter à la surface, petit à petit, pour retrouver une portance suffisante. Toutes les techniques sont bonnes à essayer mais aucune n'est vraiment efficace. Malgré tout, après 6 heures d'efforts, nous arrivons à regrouper tous les véhicules l'un derrière l'autre, dans la seule et unique trace où l'on peut espérer pouvoir repartir.

Toutes les voitures qui sont arrivées ici après nous se sont plantées, y compris celle de l'organisateur. Heureusement, devant la longueur de l'étape, les deux tiers des participants ont regagné l'hôtel par la route, et une bonne partie ont été détournés à l'entrée du Chott par l'organisation venue sur place.

Le Pajero littéralement scotché dans le Chott El Djerid

A un moment donné, nous nous imaginons passer la nuit ici, à la limite de baisser les bras tellement les efforts sont vains. Chaque véhicule sorti de cette vase se replante 50 mètres plus loin sans trouver la meilleure façon d'avancer en sécurité.

La solution est de revenir un à un dans la trace centrale, pleine d'eau mais plus porteuse, et de continuer sans jamais la quitter, même si la glissade est difficile à éviter à seulement 40 km/h avec les roues rendues lisses car remplies de boue collante.

Pourtant, au prix de quelques heures, nous y parviendrons tous et sortirons de cet enfer, non sans quelques sueurs froides dans les passages suivants, toujours menacés de sortir et de s'enfoncer de nouveau sous cette croûte de sel. C'est à 2h30 du matin que nous atteindrons l'hôtel Sahara Palace à Nefta pour une courte nuit. Quelle délivrance !

samedi 19 avril 2003

hôtel Sahara Palace à NeftaLe Pajero est dans un triste état après le passage laborieux du Chott El Djerid

Avec le cauchemar de la veille, il est pour nous hors de question de faire l'étape du jour en entier, et c'est en vrais touristes que nous abordons la route pour Kairouan, profitant du beau temps pour visiter un peu le pays.

montagnes près de Chebika, à deux pas de la frontière algérienne

Sous les conseils de Jacky qui connaît déjà un peu la région, nous partons au nord à la frontière algérienne en passant un col au beau milieu de paysages somptueux. Nous sommes proches de Tamerza. Nous nous arrêtons à l'Oasis de Chebika pour nous balader dans un théâtre naturel de verdure où palmeraie et chutes d'aux nous rafraîchissent, après tout ce sable rencontré.

Un peu plus loin, pause-dejeuner dans un petit restaurant typique et nous reprenons tranquillement la route jusqu'à notre hôtel de Kairouan, l'Amina.

Oasis de Chebika

dimanche 20 avril 2003

Ce matin, retour à Tunis pour embarquer à bord du Méditerranée pour notre voyage de retour à Marseille puis à Genève par la route. Après quelques achats de souvenirs et les formalités administratives, nous quittons le territoire tunisien.

Bonnes adresses

  • Hôtel Diar El Barbar à Matmata : tel +216 75 240 074
  • Hôtel Sahara Palace à Nefta : tel +216 76 431 700
  • Hôtel Amina à Kairouan : tel +216 77 226 555
  • Restaurant "le Rendez-Vous", à Douz

Cartographie - Bibliographie

  • Cartes de type IGN au 1/200'000ème digitalisées sur CDROM (TUNISIE). Disponibles par exemple chez Equip'Raid. L'exploitation de ce type de cartographie nécessite le logiciel Quovadis Touratech, connectable avec la plupart des systèmes de navigation GPS existants. A ma connaissance, et après de nombreuses recherches, aucune carte imprimée assez détaillée n'existe sur le marché.
  • Carte générale routière de Tunisie
  • Histoire de la Tunisie et tracés GPS du sud tunisien : Guide Jacques Gandini - "Pistes du Sud Tunisien".