Les rituels chamaniques Shuars

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jibi

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7 Janvier 2007
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Paris
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Les rituels chamaniques Shuars


Les Shuars vivent avec les esprits. D'une manière qui nous est difficilement accessible, ils croient en d'autres mondes que celui, tangible, admis par notre civilisation rationnaliste comme le seul réel.

Le soir autour du feu, ils racontent des histoires décrites comme "vraies parce que tous les Shuars les connaissent".

Ce sont des histoires de monstres semi-humains tapis dans la forêt, de Shuars qui sont partis vivre de l'autre côté de la rivière où les gens sont des serpents et les boas de petits cafards.
Ce sont les croyances et les mythes des Shuars. Vivaces, ils influent sur le mode de vie et de pensée de ce peuple de la forêt.

Les rituels pratiqués par les chamanes sont la partie la plus impressionnante de cette culture et de ces croyances.

Beaucoup connaissent leur existance, et pourtant peu de personnes ont eu le privilège de les contempler. Cette chance nous a été données à moi et certains de mes amis lors de mon voyage en 2006.




La passation de pouvoirs chamaniques



Le rôle du chamane dans la culture shuar est très important. Il est cependant difficile à percevoir pour nos esprits cartésiens. Le chamane fait des rêves, les interprète. Il est aussi une sorte de guérisseur. Il connaît les très nombreuses plantes médicinales de la forêt. Il semble être le lien entre les esprits, entre les forces supérieures et la communauté des vivants.






Les peintures de Francisco représentent ses rêves. Bien qu'il ne soit pas lui-même chamane, elle se rapprochent des songes de ces derniers.




Avant de partir à la cérémonie, Francisco nous peint des bandeaux qui serviront à la protection à entrer dans la cérémonie.


Quelques temps avant notre venue à Puyo, le père de notre amie Maria Shakay est décédé. Selon nos amis shuars, il était un puissant chamane. Son fils, Luis, le frère de Maria est lui aussi un chamane. Ses pouvoirs lui ont cependant été « retirés » quand il était jeune, car il semblait ne pas savoir s'en servir d'une « bonne manière ». Nous n'avons pas réellement réussi à savoir en quoi consistaient ces pouvoirs et en quoi ils pouvaient être « bons » ou « mauvais ». Pour ne pas que les pouvoirs de l'« abuelo » ne se perdent, il fallait les transmettre à un jeune chamane: Luis.

La cérémonie se déroule dans la forêt, non loin de la ville de Puyo. Elle a lieu au près d'un immense arbre (sûrement multi-centenaire) qui symbolise le grand-père et son esprit. Seule la famille proche (et nous) est présente à cette cérémonie: Maria, Francisco, Luis, la mère de Maria, son oncle (un chamane), sa soeur et le mari de cette dernière. Nous nous rendons au lieu de cérémonie peu avant la tombée de la nuit.



Chants tarditionnels shuars.

Francisco et Maria sont toujours volontaires pour chanter et danser: partager leur culture. Ils s'habillent donc de leur vêtements traditionnels et exécutent quelques chants avant la nuit. Ensuite, nous nous installons sous un toile de tente, autour d'un feu. La cérémonie peut commencer.



Les cigarettes blondes ont en partie remplacé le tabac traditionnel...

Pour sortir du monde purement tangible, peut-être pour accéder à une autre dimension de perception (les mots manquent pour exprimer cette réalité qui nous est étrangère), il faut d'abord absorber divers produits psychotropes.

Le premier, le moins puissant, est le tabac. Cultivé par les Shuars, il est écrasé encore frais de manière à produire un jus âcre de couleur marron. Il est absorbé par le nez et est censé donner des rêves, des songes.

Certains des participants à la cérémonie, notamment les deux chamanes, ingurgitent de l'aguayasca. C'est une drogue halucinogène puissante. C'est elle qui pour les Shuars est la clé des rêves et des pouvoirs chamaniques.

De nombreux chants sont entonnés durant la cérémonie. Ils servent à la fois à invoquer les esprits et à transmettre ses nouveaux pouvoirs au jeune chamane. Il faut aussi faire en sorte qu'il s'en serve à bon escient. Il est donc purifié.


Nous avons aussi droit à une purification. L'oncle nous souffle de la fumée de tabac sur la tête et agite un rameau au dessus de nous en engeant une ritournelle entêtante. Elle est censée nous guérir de maux dont nous lui parlons par l'intermédiaire de Maria.


La cérémonie dure jusque tard dans la nuit. Les chants reviennent plusieurs fois. Ensuite quelques discussions s'engagent jusqu'à que tout le monde tombe de fatigue et aille se coucher.Le jeune est désormais un chamane à part entière. Il lui faudra pourtant attendre plusieurs mois avant d'avoir le droit de se servir pleinement de ses pouvoirs.


antonin