Une vie de pintade à Moscou

Interview de Madeleine Leroyer

La collection des pintades se propose de faire découvrir quelques une des plus grandes villes du monde à travers des portraits de femmes. Après New York, Berlin, Paris, Beyrouth, Madrid, Téhéran et Londres, la nouvelle destination décortiquée avec brio n'est autre Moscou, la capitale de la Russie.

Vue sur les remparts d'Aigues-Mortes
L'auteur, Madeleine Leroyer Vous voulez découvrir la Russie, la vraie ? Rangez tous vos guides habituels et laissez-vous tenter par Une vie de pintade à Moscou un ethno guide surprenant qui décape les préjugés pour nous offrir un portrait cocasse mais néanmoins juste de nos consœurs russes. C’est à travers des portraits de femmes que Madeleine Leroyer nous plonge dans le quotidien des russes, un univers à part à la fois drôle, sensible et touchant. Ici, on ne vous racontera pas l’histoire de la cathédrale Basile Le bienheureux, on ne vous expliquera pas non plus pourquoi la Galerie Tretiakov possède une collection si riche d’œuvres russes… En lisant ce livre, vous découvrirez la face cachée de la Russie, bien loin de l’image un peu facile de la fille russe docile perchée sur talons aguilles. Les anecdotes ? C’est du vécu. Les bonnes adresses ? Chaudement recommandées. Alors, laissez-vous entraîner dans les arrières cours, les sous sols du métro et les dédales de petites rues. Le maître mot de l’auteur : sortir des sentiers battus ! Et on la suit avec grand plaisir…   Vue sur les remparts d'Aigues-MortesParlez-nous de la genèse de l’œuvre : était-ce votre volonté d’écrire un livre sur la société russe ?
Je connaissais la collection des pintades et rêvais d’y apporter ma plume un jour, mais sans trop y croire. Et puis, j’ai été contactée par les deux rédactrices en chef qui, après s’être assurées que mon style correspondait bien avec celui de la collection des pintades, m’ont confié l’écriture de leur nouvel opus, *Une vie de pintade à Moscou.***Quelle a été votre démarche d’écriture ? Pourquoi avoir voulu évoquer à la fois des sujets cocasses et d’autres bien plus sensibles ?**

L’écriture en elle-même m’a pris environ neuf mois, sachant que je faisais ça en parallèle de mon travail. Après, j’ai fait pas mal de recherches au préalable, donc on peut dire qu’en tout il m’a fallu près d’un an.
Il y avait bien sûr quelques règles à respecter et mes éditrices étaient présentent dans le suivi de l’écriture, mais dans l’ensemble on peut dire que c’est un livre très personnel. C’est vrai que le départ a été un peu difficile : j’ai passé plusieurs mois à chercher des adresses, ce qui est bien, certes, mais c’est plus un travail de journaliste de news. Je ne notais pas la couleur des cheveux ou bien comment étaient habillées les personnes que je rencontrais ! Et bien sûr, quand vous reprenez vos notes des semaines plus tard, vous ne vous en souvenez plus ! Non, pour écrire ce livre il m’a fallu faire un réel travail de société ; j’ai d’abord puisé dans mon quotidien et dans mes connaissances et puis j’ai élargi, les amis des amis, les contacts par le boulot, et beaucoup de bouche à oreille. Au fond c’est quand même un travail de journaliste. Pour les adresses en revanche il a fallu gratter, explorer Moscou et parfois forcer des portes ! Les chroniques, c’est du 100% vécu, les adresses, je les ai expérimentées à… disons 75% et le reste, ce sont des copines qui me les ont chaudement recommandées. Ce livre, c’est une véritable fenêtre sur la ville. Il ne faut pas avoir peur de pénétrer dans les arrières cours, c’est là que vous trouverez la « vraie Moscou ».
près ça, il n’y a pas de méthodologie particulière, si ce n’est le partage. Rester sagement assise à papoter autour d’un café ne suffisait pas. Il m’a fallu suivre ces moscovites dans leurs quotidien, c’est ce qui fait, je pense, l’originalité de ce livre : l’authenticité.
Il s'agit justement de parler du quotidien des femmes et...ce quotidien n'est pas toujours rose. Qui plus est, leurs difficultés, notamment le harcèlement sexuel ou la violence, sont très tabous ici. Evoquer les talons et les paillettes, c'est bien, mais ça n'a aucun sens si on n'a pas le contexte.
Et puis, parler des femmes est un excellent prétexte pour parler de la société et déboulonner les clichés. C’est vraiment ce que j’ai essayé de faire.

Vue sur les remparts d'Aigues-Mortes
Enseigne de supermarché russe
Quel est votre parcours ? D’où vous vient cette passion pour le russe ?J’ai commencé le russe en LV2 au collège. J’ai d’abord été séduite par la beauté de la langue et de ses sonorités. Plus tard, c’est la littérature et l’Histoire qui m’ont passionnée. Moi qui aime l’Histoire, j’étais servie ! J’ai ensuite poursuivi avec Sciences Po. Dijon, avec un parcours plus axé sur l’Europe Centrale et Orientale. J’écrivais quelques piges pour des journaux français quand je me suis aperçue que bien des publications n’avaient pas de correspondant en Russie. J’ai alors franchi le pas : j’ai pris mon balluchon et suis partie seule comme pigiste à Moscou. Je travaille aujourd’hui pour plusieurs rédactions, comme Le Figaro ou BFM TV.

Vue sur les remparts d'Aigues-MortesQuel est, selon vous, le public visé par ce genre d’ouvrage ?Ce livre est un véritable OVNI et ce serait une bêtise d’affirmer qu’il ne s’adresse qu’aux femmes. J’ai d’ailleurs beaucoup d’amis masculins qui m’ont assuré avoir adoré le lire !
Certes les bonnes adresses peuvent servir aux touristes, mais c’est avant tout un livre pour les gens curieux de découvrir une autre culture, avec l’envie ou non de voyager. Je dirais simplement que les touristes qui vont le lire ont plutôt le profil de gens qui aiment voyager différemment, par eux-mêmes, chez des amis.
Pour ceux qui aimeraient l’emporter avec eux en voyage, mieux vaut attendre la version de poche, qui sortira début 2013.

Après avoir écrit ce livre, est ce que votre vision de la femme russe, et plus largement sur la société russe a changé ?

Comme je le dis au début du livre, ces filles tirées à quatre épingles, perchées sur leurs talons aiguilles m’ont d’abord agacée. C’est vrai que ce souci de la féminité est difficile à comprendre… Je voyais d’un côté des femmes fortes, des babouchkas qui ont vécu la dureté de l’époque communiste, et de l’autre des midinettes en talons aiguilles. Les femmes russes sont déroutantes, et leur mot d’ordre chaque jour, c’est la débrouille ! Contrairement aux apparences, ce sont des femmes très fortes, bien loin de l’air simplet et lisse qu'on leur donne chez nous. Elles ont toujours le souci de faire mieux. Ecrire ce livre m’a permis de faire le lien entre ces deux facettes de la femme que je n’arrivais pas à réconcilier, et aussi à me sentir l’une d’entre elles. Aujourd’hui je me sens chez moi à Moscou. C’est une ville où il est difficile de faire son trou, mais une fois qu’on y est arrivé, c’est bon. Alors même si parfois c’est dur parce que la famille est loin, ma vie est ici, du moins pour l’instant… La preuve, je viens de me marier !

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Synopsis :
On se propose ici de vous faire découvrir la Russie autrement : à travers des portraits de femmes, vous pénétrez les couches de la société russe des nouveaux riches de la Roubliovka aux immigrés et travailleurs de l'ombre en passant par les babouchkas, les "grand mère courage", ou encore ces jeunes filles résolument modernes happées par les dictats de la mode. Cassez la glace, brisez les préjugés et la lecture de cet ouvrage vous laissera tour à tour ému, piqué, songeur, rieur ou encore rêveur. D'autant plus que les pages sont truffées de bons plans et de bonnes adresses.
Aventurier, passionné ou simple curieux, ce livre est pour vous ! "Une vie de Pintade à Moscou" de Madeleine Leroyer, éditions Calmann-Levy, 2012, 410 pages.
 

Propos recueillis par Alexandra Billard
Publié le 07/08/2012