Les peintures murales et les vitraux

Pour les vitraux, il faut de la lumière. En affrontant le verre et en le transperçant, celle-ci permet à l’assemblage de resplendir et de manifester sa richesse chromatique. L’histoire qu’il contient se dévoile au spectateur.
Pour les peintures murales, au contraire, mieux vaut une tonalité lumineuse tamisée et douce, qui plonge la fresque dans une atmosphère intime et confidentielle. Un face-à-face délicat s’instaure entre l’observateur et l’œuvre qui exhibe enfin ses atouts. C’est cette dualité lumineuse que l’on retrouve dans les deuxième et troisième étages du pavillon de tête de l’aile gauche du Palais de Chaillot, là où sont juxtaposés peintures murales et vitraux.

salle d'exposition
La crypte de Tavant

On pénètre donc dans un univers totalement étranger aux deux précédents où la lumière était éclatante et éblouissante. Dans cet espace confiné, où règnent les reconstitutions picturales et vitrées, on doit pactiser avec la pénombre et se laisser envoûter par cette ambiance calfeutrée qui contraste fortement avec l’ouverture et la monumentalité des galeries qui constituent le reste de la Cité.

Les peintures murales se succèdent selon un ordre chronologique et reflètent six siècles de création française (Moyen-âge et Renaissance). La démarche de copier ainsi des fresques nationales peu connues pour sensibiliser le public à la richesse du patrimoine français est instaurée par Paul Deschamps, directeur du musée des Monuments français de 1937 à 1961. Son idée se solde par la création de 400 pièces dont 20 en volumes. On peut encore admirer certaines d’entre elles aujourd’hui. Elles sont contextualisées grâce à la présence de 24 maquettes volumétriques au 1/500e et 8 autres au 1/33e qui permettent de mieux comprendre la situation de chacune d’elle au sein de l’édifice qui la loge.

Sculpteur mouleur
Mouleur à l'oeuvre

Que ce soit pour la coupole de la cathédrale de Cahors (Lot), pour la chapelle de Nohant-Vicq (Indre) ou encore pour la crypte de Tavant (Indre-et-Loire), le procédé reste toujours le même. Pour reconstituer, il faut avant tout construire les supports destinés à recevoir les futures peintures reportées avec précision sur des toiles. Ce sont des staffeurs-mouleurs qui se chargent in situ du support avant de confier la suite du travail aux copistes qui raccorderont alors les peintures copiées aux structures destinées à les recevoir.
Résultat : le visiteur peut explorer avec minutie la multitude de détails magnifiques qui esthétisent chacune des œuvres fallacieuses mais très fidèles (les lacunes ont même été conservées). Laissez-vous tromper et oubliez que ce ne sont que des copies, le plaisir en sera d’autant plus grand.

Du côté des vitraux, c’est encore à Paul Deschamps que l’on doit l’initiative d’une vaste campagne de reconstitution. La première copie est réalisée en 1933 et de 1942 à 1951, 12 répliques viennent élargir cette offre insuffisante. De grands maîtres verriers participent au programme (Jean Gaudin, François Lorin) et parviennent à force de travail à reproduire les vitraux les plus prestigieux de France. Reconstituer un vitrail est bien plus compliqué et plus long que dans le cas de peintures murales. Cela nécessite la dépose complète du vitrail original. Mais, ça n’a pas effrayé les artistes virtuoses du verre qui ont ainsi pu offrir à la Cité ses propres exemplaires du « David et Salomon » de la cathédrale Notre-Dame de Chartres (Eure-et-Loire), du « prophète Joël » de la cathédrale St-Etienne de Bourges (Cher) ou encore de « L’arbre de Jessé » de la cathédrale de Sens (Yonne). Les visiteurs peuvent aujourd’hui contempler ces pièces uniques en tant que copies (il n’y a qu’une copie en tant que telle) mais multiples de part ce statut même (elles sont le double de l’original).

Sophie Graffin
Crédit photos : © Capa07- Nicolas Borel ; © Archives du musée des Monuments français - CAPA