La collection de Paul Guillaume

La collection de Paul Guillaume

Terminez à présent de descendre cet escalier jusqu’à l’entresol pour y découvrir la collection de Paul Guillaume. Ce marchand d’art du XXème siècle, particulièrement doué pour dénicher les nouveaux talents, a rassemblé les œuvres de nombreux artistes aux styles différents. Son épouse Domenica a quelque peu modifié sa collection après sa mort. N’appréciant guère les toiles cubistes de Picasso, elle les revend pour acheter des œuvres de Cézanne et de Renoir.

Le parcours proposé ici nous mène de la tradition à la modernité dans la peinture. Il commence avec quelques toiles impressionnistes de Claude Monet et d’Alfred Sisley, l’un des rares impressionnistes qui n’a malheureusement pas rencontré le succès de son vivant. On remarque que les traits de pinceau de Monet sont très précis, caractéristique de ses premières peintures impressionnistes.

Galerie de la collection de Paul Guillaume

Galerie de la collection de Paul Guillaume

Il s’ensuit dans la même galerie des peintures d’Auguste Renoir et de Paul Cézanne. Les peintures de Renoir correspondent à sa période dite nacrée. Après dix ans d’impressionnisme, il considérait être allé au bout des possibilités de ce style et a choisi de revenir à une manière de peindre classique. Sa peinture est lisse et elle donne un effet nacrée à la peau des personnages. Signe qu’on est bien de retour au classique : les zones noires sont faites avec de la peinture noire. Une règle de base de l’impressionniste est justement de ne jamais utiliser de noir ni de blanc. La galerie comprend plusieurs portraits, notamment ceux d’« Yvonne et Christine Lerolle au piano ». Les œuvres de Cézanne annonce la modernité. Dans ses portraits et ses natures mortes il explore les techniques picturales, notamment comment créer des effets de profondeur et de lumière par les couleurs et les formes. Dans un de ses paysages, il superpose ainsi plusieurs lignes horizontales pour créer des plans et éviter d’avoir à faire une ligne de fuite.

La visite se poursuit dans une salle plus petite peinte en violet. Dans celle-ci sont exposés les peintres primitifs modernes Le Douanier Rousseau et Amedeo Modigliani.

Rousseau est un autodidacte qui commence à peindre la quarantaine passée. Il adopte une démarche personnelle, quelque peu maladroite mais qui donne un effet réaliste, voire surréaliste. Observez le tableau « La noce » : les éléments paraissent superposés les uns aux autres, il y a peu de relief.

Modigliani, quant à lui, sculpteur reconverti en peintre, s’intéressait beaucoup à l’art africain et notamment aux masques. Il adopte une approche géométrique et stylisée, comme on peut le voir dans son « Portrait de Paul Guillaume, Novo Pilota ».

Un visiteur devant les toiles de Matisse Un visiteur devant les toiles de Matisse

Avant d’avancer dans la longue galerie aux murs blancs, passez dans la petite salle sur le côté gauche, peinte en bleu pâle. On y trouve plusieurs tableaux de Marie Laurencin, également classée dans les primitifs modernes. Son portrait de Domenica est emblématique de son style : des formes effilées de couleur pastel. Dans une salle aux murs blancs sont exposées face à face les œuvres d’Henri Matisse et de Pablo Picasso. Les deux peintres avant-gardistes étaient à la fois amis et rivaux, il leur arrivait souvent de s’inspirer des travaux l’un de l’autre. Leur style se caractérise par un foisonnement de motifs et de couleurs, qui ne seraient pas forcément harmonieuses rassemblées ailleurs que sur leurs toiles. On peut voir comment ils explorent la composition dans « Odalisque à la culotte grise » de Matisse et dans la réponse de Picasso « Femme au tambourin ». Chaque tableau est basé sur un jeu de lignes horizontales et verticales qui donne l’effet de profondeur.

Juste après, on trouve quelques peintures d’André Derain, qui témoignent d’un mélange d’influences. Elles présentent en effet des traits à la fois classiques et modernes, comme on peut l’observer dans son portrait de Domenica.

Un couloir vous mène à la dernière section du musée. Celui-ci présente les œuvres de Maurice Utrillo avant que vous ne découvriez celles de Chaïm Soutine, deux peintres torturés aux styles très différents. Utrillo est le peintre de Montmartre. Il choisit toujours des sujets plutôt banals auquel il introduit une certaine poésie. Il s’agit d’une peinture plutôt douce. Ici, on peut voir qu’il a représenté la petite église de Saint-Pierre plutôt que le Sacré Cœur.

Dans la dernière salle, on découvre une série de peintures de Soutine. Des natures mortes, des paysages et des portraits sont répartis sur les quatre murs. Sa peinture est viscérale, tourmentée : ses touches de couleurs sont sinueuses, vives et désordonnées. Les personnages sont déformés ce qui leur confère une dimension tragique.

Vanessa Carronnier

Crédits photos : © TomFlemming, © joewen1980