Promenade architecturale

Un cabinet des curiosités à ciel ouvert

Bibliothèque Nationale de France
La BNF et son étonnant jardin central

A partir de 1990, de grands travaux reprennent dans le 13e arrondissement, plus à l'est, puis de l'autre côté de la Seine, avec la construction de la Bibliothèque Nationale de France (ou Bibliothèque François Mittérand), qui contient également un musée et de très grandes salles de lecture. Le bâtiment a une architecture plutôt simple mais qui représente bien l'esprit du nouveau quartier : moderne et ludique. La BNF est composée de quatre tours (des Temps, des Lois, des Nombres et des Lettres) qui ont chacune la même forme : celle d'un livre ouvert. Au centre et en profondeur des tours, se trouve un petit jardin, un îlot de verdure au milieu des bâtiments rectilignes, inattendu comme beaucoup de choses dans ce quartier. Quasiment en face se trouvent les Frigos, d'anciens entrepôts frigorifiques transformés (plus ou moins dans la légalité) en QG d'artistes en tous genres dans les années 80. Ils ouvrent peu souvent leurs portes, alors profitez des Nuits Blanches pour aller y faire un tour ou même pour jeter un oeil à cet imposant bâtiment dont le style tranche de façon étonnante avec celui de ses voisins.

Hommage à l’œuvre de Goscinny dans la rue qui porte son nom
Hommage à l’œuvre de
René Goscinny

Si vous prenez le temps de vous balader dans le coin, vous pourrez voir d'autres lieux à l'esthétique inattendue, comme le jardin Joan-Miro ou le centre commercial Italie 2 (dont l'immeuble à l'entrée a été réalisé par Kenzo Tange). Vous risquez alors de passer dans la rue Goscinny, qui sur toute sa longueur réserve des surprises aux fans d'Astérix en multipliant les clins d'oeil à l'oeuvre du scénariste. Vous passerez peut-être également devant la statue de « la Danse de la fontaine émergente » du plasticien franco-chinois Chen Zhen, qui

La Danse de la fontaine émergente de Chen Zhen
La Danse de la fontaine
émergente de Chen Zhen

prend la forme d'un dragon dont le corps plonge et ressort du sol à plusieurs reprises et à l'intérieur duquel circule de l'eau (oui, il y a décidément beaucoup de dragons dans le 13e). Encore plus belle de nuit, éclairée. Bâtiment plus ancien mais à l’importance non négligeable, l’hôpital de la Pitié-Salpêtrière, construit sous Louis XV pour y « enfermer » les mendiants. Un peu plus tard fut construite l’annexe où l’on logea les femmes d’une maison de force. A l’aube de la Révolution, l’hôpital comptait environ 10 000 personnes et la prison plus de 300 détenues. Ce n’est qu’à partir de 1789 (date à laquelle eurent lieu une partie des « Massacres de septembre » dans la prison) que la Salpêtrière devient un véritable établissement médical (les patients sont jusque là soignés à l’Hôtel-Dieu). En 1964, la Salpêtrière fusionne avec la Pitié, formant le groupe hospitalier que l’on connaît aujourd’hui. D’éminents médecins y sont passés : à l’exemple de Sigmund Freud ou du fondateur de la neurologie moderne Jean-Martin Charcot (à la période durant laquelle l’Ecole de la Salpêtrière fut une des plus importantes écoles d’hypnose). La ligne de métro aérienne n°6 survole une partie de l’Hôpital au niveau de la station Chevaleret.

batofar
Le Batofar et en arrière-plan
la passerelle Simone de Beauvoir

Si vous vous dirigez plus avant vers la Seine, vous apercevrez un autre anachronisme : le Batofar, "navire de curiosités sensorielles", un ancien bateau-feu (un des rares encore visibles en France) amarré au pied de la BNF et qui s'est aujourd'hui reconverti en salle de spectacle. Allez faire un tour sur leur site pour découvrir le programme des soirées. La liste est loin d'être exhaustive et il y a encore beaucoup de choses à découvrir au gré de ses errances : logement social, centre de secours, groupe scolaire ou passerrelle, l'architecture moderne a pu s'exprimer sur de nombreux supports et le 13e arrondissement est sans nul doute celui qui lui a offert le plus de possibilités. La traversée des nouveaux quartiers est la promenade idéale pour les passionés d'architecture ou même juste pour ceux, voyageurs ou parisiens, qui en ont assez des circuits touristiques classiques et qui veulent voir autre chose que les sempiternelles petites impasses pavées, déjà vues et revues par l'imaginaire romantique.

Crédit photo : © Alexandra Caussard