La petite histoire

Il faut remonter jusqu’en 1859 pour découvrir l’histoire du Cirque d’Hiver. L’anniversaire de l’invention du trapèze battant son plein, il est bon de rappeler qu’à l’époque, l’art des trapézistes de plus en plus apprécié se limitait au matériel fixe, tel qu’on le connaît en gymnastique.  C’est Léotard qui y ajoutera son ingrédient essentiel, la voltige, réinventant ainsi la discipline et la plaçant au cœur du spectacle. Le goût du danger et des sauts périlleux deviendra par la suite un élément clé de presque tous les numéros mais le trapèze est resté roi du suspens.

Quelques années avant l’invention du trapèze, l’idée d’un Cirque d’Hiver était lancée par nul autre que le directeur du cirque d’été des Champs Elysées, Mr Louis Dejean. Il choisit le quartier du boulevard du temple pour son côté animé et décide d’y édifier son deuxième cirque dont la construction est autorisée le 17 décembre 1851. L’architecte du Cirque d’Eté et de la gare du nord, Jacques Ignace Hittorf,  se voit confier la construction qui démarre dès avril 1852. Les travaux dureront 8 mois et le 11 décembre 1852, le Prince Louis-Napoléon inaugure enfin le plus vieux cirque en dur du monde. Il lui prêtera d’ailleurs son nom pendant quelques temps jusqu’en 1873, année à laquelle le cirque prendra son nouveau blason.

Le bâtiment est exceptionnel puisqu’il s’étend sur 42 mètres de diamètre, possède 40 fenêtres réparties sur 20 pans, 21 lustres à gaz et jouit de 5 900 places. Les peintres et sculpteurs Pradier, Bosio, Gosse et Barrias vont s’atteler à la décoration extérieure et intérieure lui donnant un petit quelque chose de cabaret. Au début, le cirque est consacré à l’art équestre et ses régisseurs sont Franconi et Baucher.

La famille Bouglione n’arrive qu’en 1934 et c’est le moment pour les quatre frères de s’emparer de la direction de l’établissement. Mais la dynastie n’est pas inconnue dans le milieu puisqu’on raconte que l’ancêtre de la famille, un dénommé Sampion, aurait suivi de Turin jusqu’en France une charmante dompteuse de fauves qui l’aurait entraîné dans le monde des ménageries. Son petit-fils, Sampion aussi, possèdera de célèbres ménageries à travers le pays mais c’est Alexandre, son fils qui donnera au cirque son coup d’envoi grâce à un spectacle inspiré du cow-boy Buffalo Bill. Puis tout se précipite et les Bouglione s’installent au Cirque d’Hiver.

L’histoire récente dévoile un lien fort avec le septième art et la télévision. Le cirque est le théâtre des retransmissions télévisées de l’émission la « piste aux étoiles » diffusée tous les mercredis dans les années 50, 60 et 70. L’invention de Léotard inspire le film Man on the Flying Trapeze réalisé en 1935 par Clyde Bruckman. En 1955, Carol Reed tourne sous le chapiteau d’Hiver le film « Trapèze ». Ce succès doublé de publicité insuffle de nouveau la vie dans la troupe d’artistes. Les générations se succèdent mais la famille Bouglione reste plus soudée que jamais et ses enfants triomphent eux aussi dans l’art du cirque. Aujourd’hui, le cirque permanent de Paris renoue avec son passé tout en laissant la nouvelle génération prendre les rennes de cette institution qui n’a rien perdu de sa magie.