Un double destin

Construite sur deux niveaux, la chapelle basse au rez-de-chaussée et la chapelle haute à l'étage, l'église était conçue pour accueillir d'un côté le personnel du palais et de l'autre les saintes reliques accessibles au roi en personne et à ses hôtes. Ainsi c'est à l'étage que la magnificence de la Sainte-Chapelle s'offre aux visiteurs et que la structure révèle toute sa splendeur. La salle tapissée de vitraux exceptionnels et baignée d'une lumière qu'on qualifierait presque de divine est une petite merveille !

De l'extérieur, il faudra s'armer d'un peu de patience pour pénétrer dans la cour qui abrite la chapelle et le Palais de Justice et quelques petites précautions seront prises avant de vous donner l'accès. Mais une fois le contrôle effectué, la récompense est à la hauteur des attentes. Et pour cause, sur 36 mètres de long et 17 de large et mesurant quelques 42,50 mètres de hauteur (sans compter la flèche haute de 33 mètres), les mensurations de l'édifice laisse béat et rêveur.

Chapelle basse

Dès le premier regard, les somptueuses voûtes de la chapelle basse, hautes de 6,60 contre 20,50 mètres pour la chapelle haute, impressionnent.

Plafond de la Chapelle Basse
Plafond de la Chapelle basse

La pièce qui ne bénéficie pas d'une grande luminosité en comparaison avec son double à l'étage qui est une baie vitrée géante, se rattrape tout de même par la beauté incontestée de ses murs peints. Rouge, bleu et or forment une polychromie que l’on retrouve partout dans l’édifice et les fleurs de lys et châteaux de Castille sont les motifs récurrents du décor. Déjà la minutie et la précision du travail se font remarquer et la grâce de la voûte recouverte de fleurs de lys n'échappe pas.

Mais ce que l’on aperçoit n’est pas entièrement d'origine. Endommagée à de multiples reprises, l'église dut subir une longue phase de rénovations au XIXème siècle pour recouvrer ses belles couleurs. Le spectacle est donc en partie le fruit du travail de restaurateurs doués qui s’attachèrent à reproduire le plus fidèlement possible la décoration originelle de la Sainte-Chapelle pendant plus de trente ans. Les responsables des dégâts causés à l’édifice religieux sont nombreux mais dans le cas de la chapelle basse, il s’agirait essentiellement des crues de l’hiver 1689-1690 qui seraient à l’origine de la décoloration des peintures. Malheureusement la pénurie de documents sur les choix esthétiques des architectes de Louis IX ont rendu la tâche encore plus laborieuse et les recherches scientifiques entreprises lors des rénovations n'ont pas suffit à gager de l’authenticité des nouveaux décors. Mais qu'importe, ces décors sont une somptueuse introduction à la merveille au-dessus.

Chapelle haute

Pour continuer la visite et s'en mettre plein la vue avec l'admirable chapelle haute, il vous faudra emprunter d'étroits escaliers qui n'étaient destinés à l'origine qu'à mener aux combles de la chapelle. La question est donc : par où passait le roi et les membres de la famille royale pour accéder à l'étage si prisé de l'église ? Pour le savoir, il faut remonter le temps (si si , c'est possible !) et se rappeler qu'à l'époque de la construction, la chapelle haute était en fait directement reliée aux appartements royaux du grand palais installé là.

Aujourd'hui, cette vision n'a plus beaucoup de sens étant donné que la Sainte-Chapelle trône au milieu d'une cour vide. Mais à l'époque, la grandiose double porte de la chapelle haute était l'entrée royale par laquelle Saint-Louis s'engouffrait au sortir même de ses chambrées ! Il pouvait alors parcourir les 33 mètres de l'unique vaisseau rectangulaire pour finalement atteindre le chevet ouvert sur sept pans. Là, il s'arrêtait, accédait à la tribune des reliques occupant le fond de l'abside et pouvait, grâce à l'ouverture d'un des vitraux surélevés, porter devant la foule ébahie les pièces sacrées. Aujourd'hui, seuls les petits escaliers de pierre remplissent la fonction transcendantale d'emmener les visiteurs parisiens et les touristes des quatre coins de la planète dans le royaume lumineux de la chapelle haute.
 

Alice Cannet
Publié le 07/04/10