Made in Franche-Comté
Des bijoux et des pierres pour madame
L’une des activités qui s’épanouit en Franche-Comté est la taille de pierres qui, une fois serties dans de l’or, habilleront les plus belles bagues et les plus beaux pendentifs. Le lapidaire est ici à distinguer du joaillier ou du bijoutier. Le premier taille et inscrit une forme dans le minéral tandis que les seconds se contentent de lui façonner un pourtour destiné à l’accueillir.
Une autre différence est dans le nombre : les premiers se comptent sur les doigts d’une main tandis que les autres souffrent de la concurrence. Rares en effet sont ceux qui s’adonnent à la sculpture minérale. Muni d’une tige en métal au bout de laquelle la pierre est fixée grâce à de la cire, le lapidaire se sert de ses meuleuses et de ses tours pour tailler des facettes ou pour polir des cabochons (pierre simplement polies). Le travail exige de la minutie et de la précision car les facettes doivent avoir des angles déterminés et suivent un agencement rigoureux.
En Franche-Comté, Gilbert Duraffourg est l’un des derniers artistes à savoir encore sculpter le diamant, l’émeraude, le saphir ou le rubis. Dans son atelier de Bellefontaine, près de Morez, dans le Jura, il vit de sa passion et alimente la bijouterie que tient le reste de la famille un peu plus haut dans le village. L’un des derniers, car en fait, ils ne sont plus que deux dans la région et son concurrent va bientôt pouvoir bénéficier du monopole car Gilbert vieillit et va bientôt devoir s’arrêter, après 23 ans de pratique.
Pour ce qui est de la filière « bijouterie », le risque d’extinction n’est pas le même.
Un petit tour dans Besançon suffira à nous rassurer sur ce point. Les bijoutiers ont en effet envahi la ville, ce qui démontre le succès de l’activité. Un petit tour dans la cité lovée dans un bras du Doubs (rivière emblématique de Franche-Comté) sera donc de rigueur pour combler madame.
Des montres pour monsieur ou une horloge pour la maison
La proximité de la Suisse a donné des idées aux Francs-Comtois : et si on faisait aussi des montres et des horloges pour compter les minutes et les heures ? Qu’à cela ne tienne, la région est devenue experte en la matière et vibre au rythme des tic-tacs.
Le musée Japy de Beaucourt (Territoire de Belfort) vous dira tout sur Frédéric Japy, petit villageois qui, en fondant une manufacture d’horlogerie en 1777, donna le coup d’envoi à une frénésie qui envahit le village : la fabrication d’horloges. Grâce à lui et à ses ateliers, la petite contrée gonfle et passe de 250 à 4 000 habitants. Aujourd’hui encore, les traces de cette activité sculptent le paysage avec des cités ouvrières, des châteaux patronaux, des églises, des écoles… Les restes d’une aventure humaine et industrielle qui permettent de vous accueillir dans « la pendulerie », siège architectural du musée et ancienne usine.
Continuez l’exploration du temps et de sa mesure avec le musée du temps de Besançon. Logé dans le somptueux palais Granvelle d’époque Renaissance, il approfondit la question en présentant un monumental pendule de Foucault, les premières horloges à Quartz et atomiques, des objets issus des nanotechnologies…
Horloge Utinam : design ! Il rappelle que la cité assurait en 1880 près de 90% de la production française de montres et que si un lieu devait célébrer la production de montres et d’horloges, c’est bien elle. En son cœur, les nouveaux maîtres du design ont élu domicile et apportent un nouveau souffle à l’activité horlogère. Il n’y a qu’à aller rendre visite à Philippe Lebru, fondateur d’Utinam, qui a su alléger les vieilles horloges comtoises lestées par leurs larges caissons en bois massif, pour s’apercevoir de l’évolution. La ligne est svelte et s’élève malignement vers le ciel. Le mécanisme est perché sur un promontoire élégant qui fait vite oublier les portes et les poids des pièces ancestrales. Du moderne, vous en trouverez aussi chez Akteo. Ce créateur de montres de qualité penche pour le ludique et propose des montres originales. Laquelle conviendra au poignet de madame ? Celle qui renferme la sorcière à califourchon sur son balais en l’empêchant de prendre de la hauteur ou celle aux aiguilles en forme de pinceaux ? Les amateurs de tradition et de vieilles horloges délaisseront alors Besançon pour s’éloigner vers Villers-le-Lac, toujours dans le Doubs mais beaucoup plus à l’est (carrément à l’opposé en fait). C’est là qu’est niché le musée de la montre. Ce musée conserve précieusement une collection de garde-temps datant des années 1500 jusqu’à nos jours. L’initiative avait été entreprise par deux passionnés qui ont su également rassembler les divers outils des paysans horlogers. Pas loin de ce petit village, Morteau, célèbre pour sa saucisse, ne traite plus de la montre mais revient sur l’horloge. Son musée de l’Horlogerie est une bonne occasion d’arpenter en même temps les salons du château Pertusier (Renaissance), emplis pour l’occasion de pendules et d’horloges anciennes. Lui aussi fait la part belle aux outils mais se distingue par la reconstitution d’un atelier familial animé par des automates studieux.
Le Doubs excelle donc dans la mesure du temps et de Besançon jusqu’à Morteau ou Villers-le-Lac, le pays est marqué par l’obsession pour les heures et les minutes. Il n’y a que Japy qui a échappé au Doubs pour fuir vers le territoire de Belfort et envahir le Nord afin d’y imposer sa production.
Sophie Graffin
Publié le 15/07/10
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