Visite du château

Les quatre musées ne sont qu’une parcelle minuscule de ce que l’on peut admirer au château de Fontainebleau. À côté de ces lieux d’expositions, il y a une pléiade d’appartements dont le nombre surprend. Les circuits de visite varient même quotidiennement tellement il y a de pièces à voir. Selon le jour de votre visite, vous errerez donc dans certaines d’entre-elles mais en manquerez d’autres. Un bon prétexte pour revenir. Quoiqu’il en soit, il vaut mieux prévoir la journée et préparer le dîner avant de partir.

Jardin de Diane
Jardin de Diane

Rien que les jardins par exemple nécessitent 3 heures de déambulation (circuit découverte de 8 km, suivre le balisage bordeaux). Il est très tentant de fureter dans les massifs fleuris avant de s’enfermer dans la ribambelle d’appartements qu’abrite le château. Le grand canal conduit au grand parterre (tout est grand ici ! Ce grand parterre, avec ses 11 hectares reste le plus vaste d’Europe) et y achève sa course. Au centre des parcelles, un bassin fait écho à l’étang aux carpes situé plus haut vers la ville. Le jardin anglais quant à lui, dû à l’architecte Hutault, celui-là même qui a œuvré pour la grille d’honneur, camoufle des statues entre des arbres d’essences rares et une rivière artificielle. De l’autre côté du château, vers le Nord, une Diane en bronze vous attend dans le jardin qui porte son nom. Agrandi et ouvert sur la ville au XIXe siècle, ce petit paradis verdoyant conviendra parfaitement à une balade tranquille, avant de prendre la direction de l’entrée et de la billetterie ou d’entamer la visite de la ville elle-même.

À l’intérieur, le temps sera également nécessaire pour découvrir comme il se doit les salles incontournables et les délicieuses chapelles : galerie François Ier, salle de bal, salle du trône, chambre de l’impératrice et chambre de Napoléon. Quelques précisions pour vous donner l’eau à la bouche…

La galerie François Ier : Tellement belle et tellement précoce (1528).

Galerie François 1er</a>
Galerie François 1er

Elle a servi de modèle à la galerie d’Apollon du Louvre (1661, plus d’un siècle plus tard) puis à la galerie des Glaces de Versailles (1678). Ses décors en fresque et en stuc datant de 1536 témoignent du talent de Rosso et du Primatice. François Ier est l’ordonnateur de ce long couloir savamment éclairé par une nuée de fenêtres. Le souverain au goût précieux a en effet monté le projet d’une telle galerie pour ses propres déplacements. Il empruntait souvent ce corridor du 1er étage pour aller de ses appartements à la chapelle de la Trinité ou l’inverse. On dit même qu’il en gardait la clé autour du cou et qu’il n’ouvrait les portes que pour ses hôtes de marque. Jusqu’à la fin du XVIe siècle, le lieu reste donc dans la confidence, avant de devenir public et plus ouvert.
Au XVIIIe siècle, la galerie perd un peu de sa clarté. Les fenêtres de la paroi nord sont obturées à cause du doublement de l’aile entrepris par Louis XVI. Le souverain veut en effet agrandir les appartements royaux et en installer de nouveaux au rez-de-chaussée (alors appartement de bains avec exposition de grands antiques du Vatican et de tableaux précieux à l’époque de François Ier : La Joconde, La vierge au rocher). Plus d’espace donc mais moins de lumière.

La salle de bal : Deuxième splendeur qui fera obligatoirement partie du circuit du jour.

Entreprise sous François Ier, elle ne sera achevée que sous le règne d’Henri II. Le décor de fresques sur le thème de la chasse, de la musique et de la mythologie est dû à Primatice qui l’a imaginé et à Nicollo dell’Abbate qui l’a réalisé en 1550. Sous les yeux des chasseurs et des divinités, on aurait presque envie de tenter quelques pas de valse sur ce parquet parfaitement ciré et luisant sous la lumière audacieuse qui s’engouffre dans ce vaste espace. La salle constitue une preuve parfaite que le château fût un véritable foyer culturel pendant la Renaissance. Les artistes italiens y venaient en nombre sur ordre de François Ier pour y manifester leur dextérité et leur maîtrise de la peinture et des arts.

Salle du trône
Salle du trône

La salle du trône : Autre époque, autre atmosphère.

Ici, plus de fresques aux couleurs affadies par le temps. Le tissu remplace les pigments et apprêtent la salle qui présente glorieusement le fameux trône de Napoléon sur son estrade, encerclé par deux colonnes siglées chacune par un « N » surmonté d’un aigle. Le siège impérial prend place dans une alcôve qui accueillait autrefois le lit du monarque. Napoléon a en effet voulu dévier l’usage de cette pièce, originairement chambre du roi, en la vouant à devenir salle du trône en 1805. Ce trône a, lui, été exécuté une année plus tôt, en 1804. Il était destiné au château de St-Cloud et a dû attendre 1808 pour s’illustrer à Fontainebleau.

La galerie de Diane : Où Diane tend à disparaître.

Au 1er étage de l’aile nord construite par Henri IV, la déesse romaine de la chasse prête son nom à la plus longue pièce du château. Elle se situe au-dessus de la galerie des cerfs et de multiples réaménagements lui ont fait perdre son décor renaissance qui glorifiait la divinité à l’arc frémissant. Le plafond par exemple a été repeint sous la Restauration, tandis que Napoléon III a transformé la galerie en bibliothèque, la munissant ainsi de vitrines massives se faisant face et abritant les multiples ouvrages.

Jardin de Diane
Galerie des cerfs

La galerie des cerfs : Sous la déesse, les bêtes pourchassées.

Diane chassait forcément le cerf. C’est donc tout logiquement que la galerie des cerfs soutient celle de Diane, située juste au-dessus d’elle. Sous un plafond à la française rougeoyant, des têtes de cerfs en plâtre tendent des ramures naturelles vers le centre de la pièce et remplissent les espaces entre les grandes baies vitrées. Elles font face à un mur supportant des vues à vol d’oiseau des châteaux et des domaines de chasse ayant appartenus à la couronne et mises en place sous Henri IV. Depuis les années 60, le décor s’est enrichi de grands antiques du Vatican, moulés par Primatice pour François Ier.

La salle des colonnes : Frénésie de colonnes pour soutenir les danseurs.

Avant d’accéder aux grands appartements du roi, cette pièce de style Renaissance, multipliant les colonnes monumentales en marbre sombre, servait de salle d’attente. Ordonnée par Louis-Philippe lors de la restauration du château, elle se situe sous la salle de bal. Du temps où le château accueillait la cour, on devait sans doute entendre les posés des pieds des danseurs en attendant de pouvoir pénétrer à son tour dans les nobles suites royales.

Chapelle de la Trinité
Chapelle de la Trinité

La chapelle St-Saturnin : Un roi doit pouvoir se recueillir dans la tranquillité.  

Fontainebleau possède deux chapelles et voici la plus ancienne. Chapelle royale destinée à accueillir les prières du monarque, elle possède deux niveaux, conformément au plan des Ste-Chapelles de rigueur à l’époque.
En bas, de grands vitraux de Sèvres jettent sur l’autel une couverture irisée de lumière.
À l’étage supérieur, l’admirable décor et la tribune en marbre se dissimulent au contraire dans la pénombre. Depuis que cette partie de la chapelle a été englobée dans les ailes de la salle de bal et du Tibre, les interstices manquent et il faut plisser les yeux pour découvrir la splendeur et la richesse des fresques aux couleurs vives et du plafond à caissons.

La chapelle de la Trinité : Une chapelle moins intime aux tendances baroques.

La seconde chapelle de Fontainebleau s’élève à la place de l’ancienne église conventuelle des moines Mathurins, installés par St-Louis à l’ouest de son donjon personnel. Elle intégrera vite le château, qui la phagocytera grâce aux extensions opérées par François Ier. Depuis la tribune, on peut prendre de la hauteur et mieux décrypter la voûte somptueuse qu’Henri IV a modifiée. Le reste du décor maintient le style Renaissance (seconde école de fontainebleau) avec quelques surcharges qui préfigurent le mouvement baroque. Cela reste tout de même exceptionnel et remarquable.

Ces quelques salles ou chapelles incontournables ne doivent pas faire oublier que le château de Fontainebleau était avant tout destiné à accueillir le roi et sa famille et, qu’en tant que tel, de grands appartements devaient pouvoir offrir tout le luxe et le confort nécessaires. Engouffrez-vous donc sans résistance dans la double enfilade de pièces réservées au souverain et parcourez inlassablement la longue succession d’antichambres, de salons, de chambres d’apparat, de salles du conseil et de cabinets. Attardez-vous sur la magnificence des fines boiseries, des tableaux et des tapisseries qui garnissent les murs de toile, des meubles qui marquent les épais tapis du contour de leurs pieds d’ébène et d’autres essences rares. Dans ces lieux, occupés pendant plusieurs siècles par la plus noble et la plus importante famille de France, les étoffes brillent, les ameublements précieux cohabitent et les traces royales persistent. Amusez-vous à débusquer les salamandres de François Ier et les aigles de Napoléon. Scindés en petits et en grands appartements, ces logements royaux du 1er étage, proches de la cour ovale aux origines du château vous dévoileront sans pudeur leur préciosité et leur beauté.

Certes, Disneyland n’est pas loin et absorbe la majorité du flux touristique de Seine-et-Marne. Mais résister à l’envie d’aller serrer la pince à Mickey pour venir plutôt (et non Pluto…) s’enivrer d’Histoire et de balades enchanteresses au château de Fontainebleau est une option tout aussi pertinente voire plus. Des couloirs à n’en plus finir, des chambres croulant sous le luxe et l’apparat, des musées remarquables et des jardins aux senteurs exquises ne vous feront certainement pas regretter les soubresauts des manèges et la dégustation de donuts. Venez vite à Fontainebleau, succomber au charme de la France.
 

  Sophie Graffin
Publié le 12/10/2010

Crédits photos : ©Château de Fontainebleau, ©S. Graffin