Rome cosmopolite et populaire

Piazza Navona ou Piazza di Spagna ?

Après la confrontation à l’immobilité des façades innombrables, un peu de vie et de rencontres ne peuvent faire que du bien. Rome vous proposera cela grâce à ses multiples places qui rallient les meutes venant de tous les horizons. La compétition est rude et deux sites en particulier se disputent les visiteurs : la piazza Navona et la piazza di Spagna. Difficile de dire lequel est le plus noir de monde.

La piazza Navona

La première place a un atout de taille comparée à la seconde : son histoire et sa fontaine centrale admirable. La piazza Navona, ce n’est pas moins de 240 mètres de longueur, un tracé ovale hérité de son ancien statut de stade (Domitien entre 81 et 96 av. JC avait réservé les lieux au premier stade de Rome ; tavernes et bordels suivront un peu plus tard remplaçant les combats de gladiateurs et courses ahurissantes de chars), une église attenante à un Palais (la palais Pamphili) pour l’architecture et trois fontaines pour le rafraîchissement du tout. La plus célèbre, c’est celle des 4 fleuves, qu’il faut s’évertuer de discerner entre les masses toujours plus grandissantes d’artistes peintres, de Romains en quête de divertissement et de touristes à l’affut de beauté à observer.

Trônant majestueusement au centre de l’espace, l’œuvre baroque du Bernin est remarquable. Un obélisque perce un éperon rocheux sur lequel repose 4 statues représentant quatre fleuves, un pour chaque continent. Le Nil, le Gange, le Danube et le Río de la Plata préfigurent déjà le cosmopolitisme qui sévit aujourd’hui : on vient de tous les pays pour venir soutenir son fleuve (le Danube, pour nous).
En dessous de ces quatre statues, du vide ! C’est l’exploit qu’a réussi à accomplir le sculpteur. Une anecdote assez amusante exacerbe encore plus la singularité de la fontaine : on prétend que si le personnage du Nil se voile la face ou que si celui du Río de la Plata tend la main vers l’église Sant’Agnese, c’est pour dénoncer la laideur et la monstruosité de la construction de Borromini, grand rival du Bernin. Fausse mais divertissante allégation puisque l’église a été édifiée après la fontaine ! La coïncidence reste quand même surprenante…

Si, à cause d’un manque de place, on ne peut pas s’asseoir sur les rebords de la fameuse fontaine, il faudra se replier sur les deux autres, qui se donnent la réplique aux extrémités nord et sud de la place. Celle du Maure au sud (1654) est elle aussi une œuvre du Bernin. L’autre, celle de Neptune est un ajout tardif du XIXe siècle pour répondre à un souci de symétrie.

La piazza di Spagna et la villa Borghèse

La piazza di Spagna est un autre lieu de rendez-vous pour les Romains, non plus au cœur du quartier historique mais à la frontière nord de la ville. Les touristes y viennent pour l’église française de la Trinità dei Monti fondée par les français en 1502 sur ordre de Louis XII. Les deux campaniles de l’édifice resplendissent en haut de l’escalier interminable qui la relie à la place. Tout en bas, sur cette place aux dimensions banales, la foule se délasse autour d’une fontaine en forme de barque, la Barcaccia, sans doute due au père du Bernin, Pietro Bernini qui se serait inspiré de la présence d’une épave échouée là après les inondations qui ont enseveli la ville à la fin du XVIe siècle.

Après l’avoir comme tout le monde flashé avec votre appareil photo, vous avez le choix entre une petite balade shopping Via del corso, principale rue commerçante de la ville à deux pas de là ou une promenade plus champêtre à la villa Borghèse.

Le parc Borghèse a de l’ampleur et est le plus grand de Rome : 80 hectares pourront être marqués par vos semelles. Il est le jardin d’un « casino », « petite résidence » de campagne construite pour les échappées dépaysantes de son propriétaire d’origine : le collectionneur insatiable Scipione Borghese. Ce mécène au grand flair a réuni dans sa demeure de somptueuses toiles et de nombreuses sculptures des plus grands maîtres italiens : Bernin, Raphaël, Le Caravage, Pinturicchio, Lucas Cranach, Rubens, Titien figurent au catalogue. Aujourd’hui, ces œuvres ne demandent qu’à être vues et ont été acquises par l’État en 1902. Sachez que le site regroupe cinq musées (Galerie Borghèse, Musée national étrusque, Villa Médicis, Galerie nationale d’art moderne et contemporain, Musée civique de zoologie) et que c’est donc là qu’il faut que vous alliez si les galeries vous manquent ou si le soleil s’est échappé, apeuré par de vilains nuages gorgés de pluie qui vous empêchent de profiter du cadre idyllique du jardin.

La fontaine de Trévi

  Dernier lieu de rencontre où l’effervescence est de mise : la fontaine de Trévi et son style Rococo. Avant de vous y rendre, vérifiez que votre porte monnaie est bien rempli pour respecter la tradition : si vous jetez une pièce dans le bassin, vous reviendrez alors dans la cité éternelle. Construite en 19 avant JC par Marco Vipsiano Agrippa pour alimenter la ville en eau de source, la fontaine transformée à de multiples reprises est aujourd’hui la grande attraction touristique de Rome (parmi tant d’autres…). La statue de l’Océan qui siège au centre du monticule rocheux défie les observateurs curieux, perchée sur un chariot treuillé par deux chevaux marins guidés par des tritons. Pas de panique, il ne s’agit que de pierre et vous êtes nombreux pour vous défendre !

Un petit passage ensuite par la piazza del Popolo et son « trident », point de convergence de trois grandes artères qui innervent Rome dont la Via del Corso pour se rendre au Vatican, qui n’est plus une option mais une obligation. Aller à Rome sans faire une excursion dans l’enclave catholique relèverait du sacrilège !
 

Sophie Graffin
Publié le 23/03/2010 Crédits photos : © Fototeca ENIT, Vito Arcomano ; © De Agostini Picture Library