Erice

Samedi 20 mai

Camping Athéna à Marinella - Sélin onte.
Bien dormi, à la faveur de la fatigue intense et malgré les musiques diverses et batteries lancinantes de l'entrée du camp. Il y a eu juste quelques gouttes de pluie dans la nuit et ce matin soleil bien costaud. Il est 9 heures 15, on va prendre la route vers Mazzara del Valle qui longe la mer, puis Marsala.ou autre.

On prend la grande route et même un peu d'autoroute (gratuite ) jusqu'à Mazara où elle s'arrête en pleine rocade. La S 115 lui succède, on l'emprunte jusqu'à Marsala, où les vignes poussent partout comme des champignons. Ville africaine, poussiéreuse et brûlée de soleil, Marsala est longue à traverser. Heureusement on prend la lungomare et c'est un vrai bonheur. Nous faisons la pause repas sur un parking au ras de l'eau, où les bateaux se balancent. L'air marin nous ouvre l'appétit et ce répit est nécessaire est bénéfique.

Ile San Pantaléo : Moulins à ventOn continue la route littorale qui conduit à Trapani. La route du sel passe par là, au bord de la lagune de Stagnone où les salines produisent un sel riche en magnésium, en fluor, en iode et potassium. Les sauniers travaillent à la récupération du sel, mis en tas qu'ils recouvrent de tuiles pour abriter leur récolte des intempéries. Face à l'île San Pantaléo des moulins à vent animent le paysage. Dans l'un d'eux on trouve le musée du sel, les autres sont là pour décorer le paysage et c'est très réussi.

Bientôt l'embarcadère pour l'île San Pantaleo vient nous tenter, mais on renonce vite à la traversée qui nécessite l'abandon du véhicule sur un parking jusqu'à notre retour. Ce n'est pas rassurant, ce projet là n'est pas raisonnable.

On poursuit donc notre route vers Trapani, ville la plus à l'ouest de la Sicile. De ce port partent des bateaux ralliant Tunis, les îles Egades, Panteleria et la Sardaigne. Trapani a gardé un petit côté Africain avec sa canicule permanente, ses maisons blanches dans un dédale de rues poussiéreuses où l'on se perd facilement. Mais on peut compter sur la gentillesse des gens prompts à nous remettre dans le droit chemin et n'hésitent pas à nous accompagner pour nous éviter d'autres erreurs.

Quelques églises rappellent l'art islamiques, ce qui n'a rien d'étonnant, car elles furent mosquées en leur temps.

Nous entamons maintenant le très bel itinéraire qui de Trapani conduit à Erice. La route s'enroule sur le flanc de la montagne, par dessus des paysages fabuleux. Nous parcourons 12 kilomètres de balcons, avec la mer jusqu'à l'horizon où se profile le rocher en cône de Cofano. Depuis peu un téléphérique relie Trapani à Erice, il fait éviter ces 12 kilomètres de route magnifique, mais ouvre le point de vue sur les îles Egades. Quelle que soit la route choisie elle est féerique.

Chiesa MatriceErice est donc située sur un piton de 75O mètres de haut. Les rues sont étroites et pentues, il est normal de garer le véhicule en dehors de la ville, même un peu loin, hélas ! on trouve beaucoup de visiteurs venus par bus entiers et garés là où il n'y a pas de place pour nous. C'est bien dissuasif, mais on essaie d'éteindre notre rancune en goûtant sans retenue la beauté de ce site. Nous visitons d'abord la Chiesa Matrice, église de la mère de Dieu. Dotée d'un porche baldaquin qui forme avec l'ancienne tour de guet devenue campanile un ensemble spectaculaire. Cette construction Normand » du XII me siècle fut sûrement remaniée. L'intérieur est massif, la voûte en croisée d'ogives est ciselée comme un vieil ivoire , la rosace aux tons éclatants éclaire le double transept. Détail curieux et inattendu, les agenouilloirs munis de coussins sont relevés, comme pour donner à la pénitence la douleur qui mène vers l'absolution.

Les rues finement carrelées luisent d'usure et les pas glissent dessus pour peu qu'on regarde ailleurs qu'à ses pieds. On est frappés par les différentes sortes de pavages, tantôt galets polis au soleil, tantôt petits galets sertis dans de longues pierres posées en diagonales noir sur blanc, ou l'inverse, avec la rigole millénaire au centre. Les ruelles mènent toujours à des patios fleuris où l'eau coule sur des fleurs éclatantes, tandis que de gros matous paresseux font la sieste et le guet du coin de l'oil. Les numéros des maisons et le nom du locataire sont calligraphiés sur de la céramique et placés sur la porte des maisons qui devient unique en son genre.

Erice : château médiévalPour joindre le château médiéval tout en haut de la ville, il faut traverser en entier la via Roma où se sont rassemblés tous les bazars de la création. Des céramiques sous toutes les formes, assiettes, cadrans solaires aux effigies de la Sicile : le visage d'une femme encadré de trois jambes repliées représentant les 3 Faces de l'île. Les tapis de lirette aux vives couleurs, rappellent l'art Africain, proche voisin du pays. On passe devant la brigade des carabineri à l'enseigne de céramique ornée de fleurs, puis devant l'église rose à coupoles rondes et baroques. On atteint le gardino dei Castello aux parfums de buis et refuge des oiseaux . Dans le jardin le château Normand surplombe des falaises vertigineuses et domine un paysage éclatant de soleil, tempéré par une brume de chaleur. Voilà ! c'est tout pour Erice. Par temps clair on aperçoit les îles et le cap Bon en Tunisie. On apprend plus tard que les deux tours du château doivent être transformées en restaurant.Telle qu'elle est encore Erice est un petit bijou, c'est bien dommage que tout le monde le sache.

Nous rejoignons notre parking au diable vert et cherchons une solution pour passer la nuit. Ce souci de renouvelle à chaque fin de journée à cause de la rareté des campings, ou même leur absence totale en bien des endroits. Pour ce soir nous découvrons à point nommé celui du Lido de Bonaguia en bordure de mer.

Repos bien mérité. Dans la nuit au milieu du sommeil, des pétarades effrayantes lancent des étincelles qui retombent sur le toit de notre véhicule. On n'est pas bien rassurés, puis on pense au feu d'artifice allumé pour la propagande électorale proche. Les étincelles ne sont autres que les feuilles d'eucalyptus que les déflagrations ont faites chuter.

Dimanche 21 mai

Camping du Lido de Bonaguia. Il est 9 heures, le soleil est chaud comme en canicule. En milliers d'exemplaires la bobine du candidat aux élections jonche le sol, devant le camping et dans les rues de la station balnéaire que l'on appelle ici pompeusement Costa Azzura. Il y a des rues qui s'appellent Nizo summum du luxe. Mais la mer lèche les abords d'une plage nauséabonde, où les gens se complaisent et prennent des bains de soleil sur des rochers inconfortables, couverts d'algues et de détritus. Les hôtels sont luxueux pour la région et la mer est belle, il y manque juste le « Pavillon bleu » qui garantit l'hygiène et la propreté. Un minimum au moins ...

On part sur Segeste à 5O kilomètres d'ici à peine, à l'intérieur des terres, mais pour s'extraire de Trapani, on doit demander notre chemin plusieurs fois. Prétextant le manque d'indication ( vrai ) et la difficulté de l'itinéraire ( encore vrai ) le gars interrogé vient nous précéder avec sa voiture. Beau geste! et plus fréquent que ce que l'on croit. Inattendu !

Temple de SegesteOù est le joli temple de Segeste, sauvage et magnifique, caché dans les feuilles et les hautes herbes ? Il est toujours aussi beau , doré sous un soleil brûlant, mais il est envahi par la foule. Les bus déversent tant et plus de visiteurs et il est impossible de faire une photo sans gâcher notre pellicule et notre enthousiasme. Heureusement à l'approche de midi le site se vide, nous restons presque seuls et profitons de cet instant rare pour admirer la pureté des lignes de ce temple que les archéologues disent inachevé. Il se dresse sur la cime d'un piton , tout au bord d'un profond canyon, endroit magique et l'on ne manque pas d'être subjugués une seconde fois. Après la visite, on se restaure à n'importe quelle heure sur le bord d'une route en pente, un peu éloignée, mais dans la perspective du temple que l'on peut regarder tout à loisir.

Vue de la vallée à partir du temple de SegesteNous avons encore le théâtre à voir. Il est situé sur un autre versant de ce mont Barbaro. En coupant à travers champ, deux kilomètres sont à parcourir pour l'atteindre et malgré la pente un peu raide c'est faisable, pourtant nous choisissons de prendre la navette qui permet l'économie de nos petits moyens physiques. Il plane ici une sorte de mystère sur cette cité disparue dont le temple inachevé et le théâtre sont les monuments presque intacts. Ce belvédère admirable, nous offre une vue grandiose sur les monts environnante, sur Castellamare et le serpent routier sur pilotis qui franchit allègrement la vallée. Bâti avec les pierres de calcaire local, le théâtre restauré avec minutie contient 4000 places et constitue un magnifique témoignage antique qui pourrait se situer aux environs du III me siècle avant notre ère. Eblouissement total, en descendant du théâtre, on a une vue plongeante sur le théâtre que l'on voit sous un autre angle. On n'est pas prêts de l'oublier.

Retour à la case départ, on prend une bière pression à la terrasse du café sous les arbres qui ont vu défiler l'histoire. Aujourd'hui, tout m'est émotion grâce à ce merveilleux patelin dont il ne reste que de magnifiques pierres.

Le camion garé en plein soleil nous réserve une atmosphère intenable, on part vite vers ailleurs . Il y a peu de campings dans ce pays, seuls les bords de mer en sont quelque peu équipés, à des prix prohibitifs frisant le double de ce qu'on paie en France. Malgré ça on est contents de se caser.

Apres quelques recherches, on atterrit à Nausicaa, tout petit camping de Castellamare del Golfo.La mer Thyrrénienne est à nos pieds. On a juste à côté de nous un campeur solitaire, sans tente ni véhicule d'aucune sorte, juste un sac de couchage et un peu de linge qui sèche sur des fils. On tente un petit bavardage presque impossible barrière du langage infranchissable. Pourtant on saisit qu'il est Allemand, habite Nuremberg, il nous montre une photo de sa femme, Ulrika et de sa fille Corina deux jolies blondes, ma foi ! lui c'est Manfred. Curieux ces vacances en solitaire, en ayant la nostalgie de sa famille pourtant...

On rentre et nous couchons, toutes ouies du véhicule grandes ouvertes, afin que l'air frais de la nuit puissen rentrer dans l'habitacle.