Musées de la Momie et de la Mort

Jeudi 2 Février : La Muerte

En descendant vers le jardin de la Union, nous sommes surpris de voir une longue file de vieux mexicains le chapeau sur la tête en train d'attendre patiemment devant une porte. Apres information, ces personnes ont travaillé aux Etats-Unis (comme beaucoup ici) et ont cotisé une sorte d'assurance pendant des années. Cet argent, récolté par le gouvernement américain, a été transféré au gouvernement mexicain afin d'être rendu aux intéressés. Mais le Mexique a tardé pour leur rendre. Bizarrement, les élections approchent et, comme par hasard, l'Etat devient philanthrope. Malheureusement ces anciens travailleurs ne récolteront pas la totalité de leur " retraite ". L'élection suivante peut être...

Aujourd'hui, c'est musée et on peut dire que la ville en collectionne des originaux. Nous débutons par celui de la Momie. Perdu au milieu de nulle part, on y arrive a pied après une heure de marche et quelques escaliers montes et descendus. Mais avant de vous raconter la visite, il faut comprendre les rapports que les mexicains entretiennent avec la mort, et qui expliquent l'existence de ce type de musée. Alors qu'en Europe nous nous efforçons d'oublier l'inévitable fin en occultant la moindre référence, au Mexique la " flaca " est désinvolte, la " catrina " est irrévérencieuse, sans angoisse, amicale et un peu envahissante. De nombreux lieux sont baptises par de noms lugubres : la calzada del Hueso (avenue des Os), Barranca del Muerto (ville appelée le précipice de la mort), Bar la Calavera (le squelette), etc… Quant à la fête des morts en novembre, elle est une des plus spectaculaires du Mexique et revêt un Un squelette en pantchocaractère beaucoup plus festif que chez nous. Dans chaque maison un autel est dresse en l'honneur des morts, les cimetières sont en fête, les parents apportent sur les tombes des offrandes, des fleurs et …des musiciens pour jouer les morceaux préfères du défunt. A cela s'ajoutent masques et déguisements à la Halloween. Même l'artisanat reflète ce culte de la Mort avec ces poupées-squelette rappelant " Corpse Bride ", le film de Tim Burton. L'art pictural aussi est souvent violent et morbide (comme le peintre Santiago Carbonell).

Mais, bien au delà des frontières du Mexique, cette commémoration est typique au continent sud américain : elle mixe les rituels funèbres des ancêtres indigènes et la liturgie catholique imposée par les conquérants espagnols au XVIeme siècle. On retrouve les concepts indigènes du voyage de l'âme au pays des morts, de la communication entre les morts et les vivants et de la vie qui continue après la mort ; le tout brassé aux notions chrétiennes du Jugement dernier, du Ciel, du purgatoire, des limbes et de l'enfer.

Revenons à nos moutons pour ne pas dire à nos momies. Le musée est une succession de salles ou sont exposées une centaine de cadavres, le visage fige à tout jamais. Ca fait vraiment bizarre ; en entrant dans une nouvelle salle on se sent mal a chaque fois, pas moyen de s'habituer a ces corps seches parfois dévêtus ou complètement habilles de vêtements d'époque (fin XIX début XX) et encore mieux, avec seulement des bottes aux pieds ! Ces corps ont été exhumes dans un état de conservation exceptionnel en raison de la composition du sol et de l'air très sec, aucun rapport avec le processus de momification de Ramsès ! Pour rentrer dans les détails, les poils pubiens, ceux des jambes et du torse et même les parties génitales sont encore bien visibles (et bien fournies...). Le plus étrange sont ces momies d'enfants, de bébés ou de fotus.

Il semble que ce soit une des attractions favorites des touristes mexicains. Un photographe professionnel est la pour photographier les familles en visite devant une momie " debout " pour l'occasion. Les couples n'hésitent pas y venir avec une gamine de trois ans dans sa poussette, qui arrive juste a la hauteur de ces visages macabres grimaçants. Fais de beaux rêves ma puce...

Les pieds d'une momie

On termine par le musée de la Mort qui en fait partie. C'est pas mal non plus. Cette fois on se croirait dans la maison fantôme de la Foire de Trône. Un couloir sombre avec fausses araignées dans des toiles, lumière qui éclaire un squelette quand on passe devant etc…On retiendra surtout ce cercueil tapisse de pieux sur lesquelles est empale un homme condamne par l'Inquisition qui pensait ainsi lui infliger des souffrances dans l'au-delà. Mais de qui se moquent-ils, comment peut-on souffrir après la mort puisque selon l'Eglise il ne subsiste que l'âme ? En tous cas, étrange comportement pas tout a fait en accord avec les doctrines catholiques... Il y a aussi tous ces objets de torture et la fameuse ceinture de chasteté qui assurait la fidélité de l'épouse pendant les absences du mari. Ben ouais, si t'assures pas faut t'assurer autrement mon gars !

Petite séance de peinture pour Sophie qui s'inspire du panorama de la terrasse de la guest avant de grimper au Pipila, immense statue d'un héros mexicain de la guerre d'indépendance. L'esplanade, au sommet de la colline, surplombe la ville et offre une vue splendide sur les monuments, notamment la magnifique basilique de Nuestra Señora de Guanajuato.

La cuisine est LE lieu idéal pour nouer les rencontres entre deux séances d'épluchage d'oignons. Ce matin un couple de canadiens la cinquantaine et hier, on a fait la rencontre de Papi Brossard, Alain de son nom, un prof d'économie français à la retraite venu travailler dans les archives de la ville.
Christophe ira finir sa soirée au bar-fly (rien a voir avec son consœur des Champs-Élysées), bar mélangeant les populations estudiantines et touristiques. Sol, Corona et India sont avalées sous fond de rock espagnol, ska et reggae.