Un des objectifs de ma mission est de construire une exposition à mon retour en France. Afin que je puisse ramener des objets artisanaux, Maria me guide en voiture vers une boutique sâme, située à la sortie Est de Kiruna. Nous y sommes accueillies par une femme d'âge mur ; l'heure trop tardive ne nous permettra pas d'observer les ouvrières sâmes au travail. En revanche, mes achats y seront divers et variés : porte-monnaie et écussons de cuir brodés de signes lapons en argent et en étain, tasse noire incrustée d'un signe lapon, bonnet d'enfant âme, bois de renne immense La difficulté sera de les ramener en France ! Comme dans tout lieu public, il y a possibilité de s'installer à une table pour prendre le café.
Il est déjà 16h30 et la nuit tombe. Sur la route menant au cœur de Kiruna, nous pouvons admirer le chemin de lumières balisant la piste de ski, ouverte au public jusqu'à 22h. Nous nous dirigeons alors vers Jükkajarvi, situé à quelques kilomètres au-delà de la base de mon entreprise.
Nous nous rendons tout d'abord dans une petite église très typique, non loin de l'hôtel de glace. Il neige à nouveau . Les grains passant dans les filets de lumière des réverbères brillent comme la poudre de "Bonne nuit les petits" lancée magiquement par Pimpronelle ! Nous passons dans le campanile avant de pénétrer silencieusement dans l'église située juste derrière. Le retable est une merveille aux couleurs vives retraçant la culture sâme. Nous sommes seules ; le temps ne nous est pas compté dans cet endroit plein de sobre richesse.
Puis c'est notre entrée, gratuite, dans l'opulence de glace. Le palace est reconstruit chaque mois de novembre pour six mois de froid intense au bord de la rivière. Tous les murs, plafonds, lustres, meubles et accessoires sont taillés et travaillés dans la glace par des sculpteurs de renom ; autant dire qu'une nuitée ici coûte cher ! Et pourtant la température de moins 7°C qui y règne, opposée aux moins 30°C de l'extérieur attirent de nombreux touristes. Les lieux sont d'ailleurs aménagés pour y passer des moments mémorables : petits salons autour du bar, une vingtaine de chambres et de suites, un théâtre, une chapelle… Un univers fait de brillance et de transparence bleutée… De quoi ne plus savoir où poser le regard ! De quoi aussi se geler les pieds lors de notre piétinement d'une heure et plus si l'on prend, comme moi, des photos. A noter que sièges et lits sont recouverts de peau de renne afin de se réchauffer un peu !
Pendant que nous dégustons un jus d'airelles chaud au bar, nous sommes envahis par un groupe de personnes habillées de grandes capes avec capuches couleur alu, ressemblant un peu à une couverture de survie. Il s'agit de spectateurs venant d'assister à une des représentations théâtrales quotidiennes.
Avant qu'ils ne ferment, Maria me conduit vers l'accueil et sa boutique. Je repère quelques objets, notamment des chandeliers en cristal. Il est 22h , j'ai froid et faim. Nous dînons de l'autre côté de la route, au restaurant de l'ice hotel, chauffé ! Nous sommes accueillies dans une somptueuse salle. Toutes les tables sont nappées en blanc. Nous sommes placées à proximité d'un couple fêtant probablement un anniversaire au champagne. La jeune femme brune porte élégamment une robe noire sans manches et ne semble pas souffrir du froid.
Je n'y tiens plus ; j'ôte discrètement mes grosses chaussures afin de réchauffer lentement mes pieds contre le radiateur. Nous choisissons un plat unique de très belle présentation mais finalement peu copieux : bloc de glace évidé dans lequel se trouvent deux feuilles de salade, un petit morceau de poisson fumé, un autre de mangue et une petite olive noire ; plus un café, le tout pour 200 couronnes suédoises, soit 23 euros. Fort heureusement, nous avons bien déjeuné ce midi au Ferrum !