Direction barrière de corail
Pour atteindre la barrière de corail, nous devons franchir la cordillère australienne et grimpons rapidement jusqu'à mille deux cents mètres d'altitude. Nous croisons de petits chalets de montagne entourés de grasses prairies où pâturent de beaux troupeaux dans les brumes d'un orage passé. Quelques éoliennes tournent lentement. Un peu plus loin, nous traversons de grandes plantations de manguiers et en profitons pour acheter un plateau de ces superbes et délicieux fruits sur le bord de la route. Nous payons dans la boite d'honnêteté. Ici les agriculteurs n'attendent pas le chaland. Ils installent leurs fruits sur le bord de la route avec le prix indiqué sur un carton et chacun met l'argent correspondant à ses achats dans la boite.
Avant d'entreprendre la descente vers Cairns nous jetons un regard sur les impressionnantes chutes de la rivière Barron gonflée par les pluies de mousson.
La barrière de corail, autant le dire tout de suite nous déçoit pour plusieurs raisons. Nous nous attendions à quelques belles plages, des eaux turquoise et une faune marine importante que l'on pourrait admirer à l'aide d'un masque depuis la côte, un peu comme en Polynésie. Ici rien de tout cela. Comme son nom le laisse supposer, il s'agit d'un paysage sous-marin mais qui se situe entre cinq et trente kilomètres de la côte. Pour s'y rendre, il faut louer les services d'une agence qui facture au prix fort la balade dans des embarcations à fond de verre. De plus en cette période de l'année la plongée, tout comme la baignade est interdite. De minuscules méduses, pas plus grosses que l'ongle du pouce et pourvus de longs filaments de plusieurs mètres de long et dont le seul contact peut vous envoyer au paradis ou en enfer selon votre passé terrestre, pullulent dans ces eaux de novembre.... à mai. Si cela ne suffit pas à vous convaincre, peut être que les crocodiles marins également présents et leurs longues dents effilées y parviendront-ils. Des panneaux d'interdiction sont présents à chaque accès à la côte. Il en va de même pour les estuaires et rivières que remontent méduses et sauriens. Aucun doute possible sur la véracité de ces mises en garde. Personne sur les plages, personne dans l'eau. Une balade dans Cairns nous révèle la tristesse de la situation. Une immense piscine en bord de mer est envahie par la jeunesse "Cairnaise". Les parcs sont pris d'assaut pour la bronzette.
Direction le Sud
Inutile de s'attarder, nous mettons cap au sud. Si les routes ne posaient pas problème jusqu'alors, à part pendant les inondations, il n'en va plus de même. Nous avançons maintenant sur une route sinueuse guère plus large qu'une de nos départementales et souvent en mauvais état, largement en deçà de ce qu'elle devrait être pour absorber l'importante circulation. Quatre vingt dix pour cent des vingt et un millions d'habitants que compte le pays sont installés sur la côté entre Cairns et Adélaïde et bien évidement la circulation s'en ressent. Je me croirais revenu par moments aux plus mauvaises heures de la nationale 20, lorsqu'il fallait douze heures pour relier Paris depuis Brive. De longues files de voitures et de camions se suivent guettant les rares et courts créneaux de dépassement pour foncer...jusqu'à une nouvelle file. Pendant prés de mille kilomètres nous roulons entre les deux murs de verdure des champs de cannes à sucre. Nous croisons de nombreuses voies ferrées qui permettent aux trains de venir charger la canne directement à la ferme. Le paysage est vite tristounet. Les camions qui ici, ne sont pas limités mécaniquement en vitesse me pressent. Ils me suivent à plus de quatre vingt dix kilomètres par heure, le nez de leur gros Kenworth à deux ou trois mètres. J'entends le ronflement excité de petits coups d'accélérateurs de leurs puissantes turbines comme un avertissement à dégager la route. Lorsque faute de place je les fais attendre un peu trop, il arrive qu'un de leurs conducteurs me fasse savoir son mécontentement en me "serrant" lors du dépassement. Je lui réponds d'un doigt vengeur qu'il ne voit probablement pas. C'est dans ce climat d'allégresse que nous atteignons Brisbane où nous devrons embarquer le camping car vers l'Amérique. Nous marquons une pause pour rencontrer Holly. C'est elle qui s'occupe du dossier. Pour le moment aucune nouvelle du bateau. Nous sommes encore à trois semaines du départ. Nous continuons vers Sydney.
Au sud de Brisbane, à part la route, les choses s'arrangent considérablement. Nous roulons toujours, coincés entre la cordillère australienne et la mer. Nos sondages vers la côte pour les bivouacs nous conduisent vers de belles plages de sable blanc ou à l'intérieur de parcs nationaux où l'on côtois kangourous, émeus, varans et toute une variété d'oiseaux tellement habitués à l'homme, qu'ils s'approchent de nous à pouvoir les toucher. Magnifique ! Cerise sur le gâteau, les méduses et crocodiles ne sont pas admis sous cette latitude.
A Coolangatta, nous admirons la dextérité des surfeurs qui frôlent les rochers pour exploiter à fond les puissants rouleaux. Quelques plaques commémoratives nous rappellent que tous n'y parviennent pas. Nous ratons de cinq jours une épreuve du championnat du monde. Dommage !