Céphalonie

Vendredi 10 Juin

Port de Vassiliki à 7 heures 40.
On n’a pas si bien dormi que ça, à cause des moustiques insensibles à notre insecticide. Même le  « Pif-Paf » acheté en Syrie les laisse indifférents et affamés…Nous avons eu droit aussi à une discussion de jeunes gens sortant d’un bar assez éméchés et tapant sur le camion à coup de poings.  A la fin de leur dispute ils sont partis épaule contre épaule, pour ne pas tomber. Les fins de semaines sont redoutables dans bien des pays où l’alcool coule à flots et fait des ravages. Il était deux heures du matin lors de cette algarade, on n’a plus dormi du tout, épiant le moindre bruit suspect. Mais rien d’autre ne s’est passé.

L’embarquement pour la Céphalonie aura lieu  à 12 heures 30 précises, il faut être présents dès 11 heures 15. On va donc se placer sur le port d’embarquement où peu à peu les passagers arrivent. Il y a beaucoup de piétons, de vélos, des voitures et deux camping-cars. Nous et un Rapido du Nord.

Au salon du ferry, il y a matinée folklorique. Nous aimerions bien nous glisser et voir évoluer les danses accompagnées du bouzouki. Impossible ! Tant les rangs sont serrés. Du coup nous allons dans la coursive côté abrité du vent et Jeannot filme la cabine de pilotage où la conduite se fait avec un seul doigt, en toute décontraction……

embarcation pour la CéphalonieOn n’est jamais en haute mer pour un si court voyage, des îles se profilent  à tout moments et l’on aperçoit Itaque avant  Céphalonie.. Bientôt le port de Fiscardo signifie la fin de la traversée et l’on quitte « Cap’tain’ Aristidis » jusqu’au retour.

Nous voudrions bien faire une pause au port de Fiscardo, mais impossible ! La grande rue de ce petit port est un cul se sac et on y est en plein dedans .Pour revenir sur nos pas il faut entrer dans la cour du musée de la mer protégé par l’UNESCO et manœuvrer précautionneusement. Un jeune Français coopérant nous aborde et nous invite à venir voir son travail de protection des fonds marins. Nous promettons notre visite pour le retour, ainsi que pour le musée contenant des trésors que ces jeunes explorateurs ont trouvés en mer.

De Fiscardo à Assos, la route est tracée à flanc de montagne et nous réserve des points de vue superbes. Partout des terres émergées et verdoyantes entre lesquelles se glisse la mer Ionienne, comma autant de fjords. Il faut s’arrêter partout, revenir sur ses pas, pour voir encore le paysage sous un autre angle.

la presqu'île rocheuse d'AssosAssos occupe un site magnifique. Bâtie en amphithéâtre la ville nichée dans une minuscule baie est protégée par une presqu’île rocheuse surmontée d’une forteresse Vénitienne érigée là au VVIe siècle pour protéger les habitants des invasions de pirates. A notre avis c’est la plus jolie ville de Céphalonie.

On aperçoit la plage de Myrtos, depuis la route vertigineuse. Composée de sable fin elle attire de nombreux baigneurs qui, vus de notre belvédère ressemblent à des fourmis .C’est la plus belle de l’île, avec son lagon bleu turquoise encadré de majestueuses falaises blanches. Puis la route redescend jusqu’aux rivages d’Argostoli, la capitale de l’île.
Nous venons de traverser toute la côte ouest de Céphalonie et trouvons refuge pour la nuit, sur la plage déserte de Lithoros. Un site pareil, pour nous tout seuls c’est inespéré. D’un côté la mer, de l’autre un kiosque à pique-nique qui sert aussi d’Abribus. C’est calme, idéal pour le repos dont nous avons besoin. Au loin, dans la mer nous apercevons un ferry qui accoste dans un port tout proche et c’est vrai que dans une île il y a des ports partout….et des bateaux qui cherchent la terre ferme. Un bateau tout illuminé, c’est une fête en mer, du rêve qui arrive d’ailleurs, d’une autre terre ferme, ou d’une autre île, pour nous qui le voyons arriver lentement, il n’y a plus qu’à imaginer…. .Dans ces ports on trouve aussi des tavernes et des chambres à louer à la pelle. Il y a un seul camping dans toute l’île et il est fermé, donc il reste pour nous le sauvage que l’on pratique exclusivement, prudemment certes  et parfois avec difficultés, car assez mal vu.

En tout cas, voici une jolie journée qui nous réconforte de celles perdus au milieu d’une foule pressée, dans ces incroyables temples des temps passés depuis longtemps. Nous avons près de nous quelques barques de pêcheurs amarrées, une plage de gros galets et quelques grains de sable.

Dodo !

Samedi 11 Juin

Plage de Lithoros, après la ville de Pératata.
la plage de LithorosLe ferry d’hier au soir vient de repartir, il a simplement fait escale pour la nuit. «  Mais c’est un yacht » :! Me dit Jeannot qui a l’air de s’y connaître….Un autre vient de transiter dans les parages, comme pour confirmer ses dires. 

Mais réveillons nous, il est 8 heures du matin, sur la plage déserte, le jeune loueur de parasols et de transats n’a eu aucun client depuis hier, mais peut-être aujourd’hui Samedi les amateurs de plage se décideront à lui rendre visite. En tout cas pour l’instant les 16 parasols bleus sont en attente, désespérément fermés.

Je fais une photo du site si joli qu’on a du mal à le quitter.

Le long de la route qui traverse l’île en son centre pour joindre la baie de Sami , la route s’élève en sinuant au flanc de collines hérissées de cyprès plantés en ligne, comme pour faire écran . Il y a de belles échappées ménageant de beaux points de vue, puis la route redescend vers le plateau intérieur où se perdent les villages aux noms étranges à la même terminaison : Pératata, Kokolata ; Lourtata. Etc  Il y a sûrement une signification que nous ignorons, mais à chaque découverte ça nous amuse bien.

A Sami, nous arpentons les quais où foisonnent les restaurants de plein air, abrités derrière les auvents de plastique transparents. De l’autre côté de la rue, c’est l’alignement habituel des villes touristiques : tavernes, restaurants, bazars, tandis que les hôtels colonisent les collines avoisinantes, laissant le bourg tout entier à son agitation durant les deux mois de Juillet et d’Août.

A côté de notre stationnement, la plage de galets blancs est équipée de parasols et de transats assortis. Le tout est fermé à cause du vent qui sévit aujourd’hui et aussi du manque de clients en ce jour de Juin où la saison se prépare à entrer en lice. Les geysers de flotte giclent au-dessus du parapet et les rouleaux d’écume s’en donnent à cœur joie. Les maisons neuves et colorées furent rebâties après un séisme qui avait ravagé l’île en 1953.

Après Sami, nous faisons escale à Poros, cité balnéaire située en impasse sur la côte est, ensuite nous descendrons vers le sud encore bordé de plages puis nous atteindrons la côte ouest et la capitale Argostoli.
le curieux obélisque de Poros

On atteint cette grande ville par un curieux pont qui serpente juste au-dessus de l’eau et qui relie les deux rives de la lagune. Il fut construit par un Suisse au service des Anglais en 1816 et subsista après le séisme de 1953  qui ravagea la ville. Au milieu de l’eau un curieux obélisque est placé là, peut-être est-ce un monument commémoratif ?  Après notre passage, nous nous apercevons, un peu tard, que notre poids dépasse celui maximum que le pont peut supporter, terreur rétrospective, mais tout s’est bien passé !...

Les jolies maisons qui bordent le front de mer, s’échelonnent sur les collines qui cernent la ville. Leurs couleurs pastel font une image de toute beauté, reflétée dans l’eau, et que le soleil du matin illumine. Elles furent reconstruites après le séisme et c’est ici qu’est centralisé le commerce touristique le plus luxueux de toute l’île.

Le port quant à lui offre aux bateaux de plaisance, voiliers et petits paquebots un excellent point d’ancrage.
Nous allons tenter de dormir sur le port, après avoir admiré les beaux bateaux, ferries et yachts et avoir usé nos jambes dans la ville.

Mais on s’aperçoit trop tard de notre erreur….Le trafic intense, nous empêche de trouver le sommeil….Moteurs et camions sortant des soutes sirènes hurlantes, sol tremblant au passage des monstres ; échanges verbaux  des voyageurs à pieds. Ca dure longtemps….ensuite sommeil bien gagné !...

Dimanche 12 Juin

Pot d’Argostoli, Céphalonie. 7 heures 20 beau soleil.
un yacht anglais dans le port d'Argostoli« Dream catcher Limmington ». C’est le nom d’un magnifique yacht anglais, que je photographie sous tous ses angles tant il est somptueux.

L’île de Céphalonie a le profil d’une main dont la presqu’île de Paliki serait le pouce, nous allons donc visiter cette presqu’île avant de retourner sur nos pas.

Considérée comme le jardin de la Céphalonie, Paliki offre des paysages riants et tout fleuris. Des collines vertes et tapissées d’arbres fruitiers, de vignes et d’oliviers. Les villes aux maisons colorées et croulant sous les lauriers roses, invitent à la promenade, tandis que les panneaux indicateurs continuent de nous emplir d’hésitation. Nous sommes à Lixouri capitale de la presqu’île.

Lise Marie, attachée d'ambassadeMais devant l’un d’eux, quelqu’un nous parle Français….Il s’agit de Lise Marie, française de Bordeaux, occupant ici un poste d’attaché d’ambassade. Son job consiste à sortir d’affaires les Français voyageant en Grèce  en butte à différents problèmes : accidents, pertes de passeports, etc.….

Nous parlons beaucoup ensemble, elle nous prodigue ses conseils et nous lui posons plein de questions. Elle porte en bracelet un très beau komboloï en jais et nous parle à cette occasion de sa conversion à la religion orthodoxe à peine différente du catholicisme. Nous parlons de nos visites aux Météores et au Mega spileo où elle rêve d’aller prier. Tout ceci exploité en une ou deux heures, puis elle nous fait visiter sa maison toute rose et son jardin où les fleurs occupent une grande partie du territoire, le reste étant réservé aux légumes et aux arbres. Au fond coule la mer Ionienne, tandis que le mari ancien marin ponce la coque d’un bateau …autre façon de naviguer entre rêve et réalité. La petite fille a huit ans et s’appelle Adelaïde, elle pépie autour de nous et interroge sa grand-mère en grec. On peut imaginer que la deuxième langue étrangère qu’elle étudiera sera le Français …enfin espérons le !....Sur le plus haut balcon de la maison flottent enlacés les deus drapeaux : Grec, Français…entente très cordiale dans cette famille.

Nous suivons les conseils de Lise et découvrons de jolies baies, cernées de falaises blanches qui accentuent encore le bleu de la mer, mais les accès sont souvent difficiles pour nous,  à cause de routes étroites et sinueuses, nous manquons des sites intéressants. Heureusement les hautes falaises sont là, merveilleux belvédères où la vue plonge jusqu’à l’infini. On a vite fait le tour des côtes  et arpenté les villages, alors on ne s’éternise pas trop dans ces paysages de verdure et nous quittons Paliki sans revoir Lise à qui nous avions promis une autre visite.

Quittant le pouce pour la main, on retrouve Fiscardo, notre port d’attache, embarcadère pour Leucade. Port de pêche de carte postale Fiscardo aligne ses maisons et ses tavernes le long du quai. Si j’ajoute les bazars et  échoppes de souvenirs, il ne reste qu’un tout petit chemin pour circuler en feintant à travers tables et chaises peintes en bleu. L’animation qui règne ici dès 18 heures est incroyable. Il y a des touristes partout et des flots de musique venant de tous horizons. La fête foraine dure deux mois au moins et les yachts viennent s’amarrer au quai, au beau milieu de l’animation, ajoutant leur note somptueuse au populaire de l’endroit.

Dans ce fichu port point de parking. Ceux qui nous sont dévolus longent la route et son rasés par une circulation effrayante le Dimanche soir. Sinon il n’y a rien d’autre, la route qui mène à l’embarcadère est étroite en pente raide, avec la mer au bout, sans barrière d’aucune sorte ? Ca a l’air d’une blague, mais c’est ainsi !...

On aurait certes mieux fait de prendre le dernier ferry, mais on voulait visiter la ville, faire un peu de shopping, voir le musée de la mer où nous attend notre jeune compatriote. ON a besoin d’une autre demi-journée pour tout faire.

On se résigne à utiliser ce parking municipal en bord de route, à contre cœur et surveillons le trafic. On espère la paix pendant un moment. Mais dans la nuit, il n’y a plus de lumière et les voitures en trombe sous foncent dessus. Jeannot qui a toujours le mot qui convient me dit qu’on va se faire écharper, avant qu’il soit jour

Alors nous voilà à minuit cherchant un endroit paisible que l’on finit par trouver à proximité d’un  immeuble «  Rooms to Let », tout au ras de la digue, sans parapet. Je ne dis rien des manœuvres de Jeannot dans le noir, pieds nus sur les pédales,  ni de ma tenue en pyjama dans la rue heureusement non passante. Sitôt couché, il ne se souvient pas d’avoir serré le frein à main….La mer est à nos pieds, profonde et ténébreuse, comment avoir l’esprit tranquille après ça !....

Il se lève à nouveau, serre le frein, passe la vitesse, et…..De guerre lasse on s’endort jusqu’au matin.